INTERVIEW

Wax Tailor Interview

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Wax TAILOR

en interview

Son visage ne vous dira peut-être rien…
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Je doute par contre que son nom vous soit totalement inconnu mais une chose est sure, sa musique ne peut pas vous avoir échappée ! Original et inclassable, Dj, créateur d’un nouveau genre, Wax Tailor est un artiste des plus discrets qui n’a pas cédé  à la starisation ambiante, un homme accessible, d’une gentillesse rare… Malgré une renommée internationale et un emploi du temps surchargé ! Une magnifique rencontre que je suis heureuse de pouvoir partager avec vous dans son intégralité cette fois sur notre site « Le-mensuel.fr ».


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Interview en exclusivité de Wax Tailor lors de son passage aux Voix du Gaou à Six-Fours-les-Plages le 24 juillet 2010 pour « Le-mensuel » N°307.

WAX TAILOR Interview

Interview en exclusivité de Wax Tailor lors de son passage aux Voix du Gaou à Six-Fours-les-Plages le 24 juillet 2010 pour « Le-Mensuel » N°307.

Morgane-L : Qui est Wax Tailor. un pseudo ou une double personnalité ?

Wax Tailor : A l’origine c’est surtout un pseudo qui pour moi représente au mieux la nature de ma musique et de mon travail, après je dirai qu’avec le temps, la tournée, la route, les aspects scéniques, c’est aussi une façon de jouer avec un double schizophrénique, c’est vrai… dans le sens où je suis quelqu’un de plutôt introverti, plutôt solitaire, enfin plutôt tout le contraire de ce que je suis censé faire en tournée et sur scène !

C’est une manière de se cacher derrière un personnage, de mettre un costume pour jouer quelqu’un d’autre.

Comment fais-tu pour ne pas tomber dans une sur médiatisation ?

Il y a pas mal de réponses à ça…

Je dirais qu’il y a déjà pour moi de façon intrinsèque, ce qui me semble le plus important, c’est que c’est la musique qui prime. J’ai même mis du temps à accepter le minimum syndical en terme d’image, alors peut-être que le fait d’entrer dans un double permet d’arriver un peu plus à faire la part des choses. Mais d’une part ce n’est pas ce qui m’importe le plus et d’autre part, je crois qu’il y a une double réponse là aussi.
Pour être très honnête, je m’aide autant qu’on m’aide… D’un côté, il y a des choses que je ne veux absolument pas faire car je suis musicien, que je ne l’oublie pas et qu’il y a des choses en termes de média que je ne comprendrai jamais ! 
Pourquoi certains artistes n’hésitent pas à se fourvoyer ? Ca c’est hors de question et puis pour le reste, je dirais que les quelques occasions qu’on pourrait avoir d’obtenir un peu plus de visibilité sur des choses que je ne refuserais pas forcément, on ne nous les propose pas non plus ! (rires)
On a l’impression justement qu’il faut accepter un rite initiatique qui est de passer par certains talk shows pour exister et être invité ailleurs… Ca ne risque pas d’arriver car ce n’est pas au programme !

 

Ne pas connaître ton visage éveille la curiosité…

Pour le coup, mon ego se satisfait parfaitement de tout ça !
C’est marrant parce que des fois je vais être très tatillon sur l’orthographe du nom, si je vois Wax Tailor écrit Taylor, je vais être le 1er à râler alors que je me fous qu’on voit ma tête ! Ça peut paraître paradoxal mais c’est l’identité du projet qui m’importe.
Je suis ultra regardant sur tous les aspects visuels qui sont autour: pochette, clips… Ca, ça m’importe vraiment.

Les débuts de ta carrière ?

J’ai commencé à faire de la musique il y a… ouh là… au début des années ‘90 en gros et la porte d’entrée dans la musique a vraiment été la culture hip hop avec un groupe qui s’appelait La Formule au sein duquel j’ai d’abord officié en tant que manager, ensuite en tant que producteur puis compositeur.

Pendant tout le courant des années ‘90, j’ai surtout surfé entre plusieurs projets. J’ai commencé à travailler avec une chanteuse sur un projet plus identifiable trip hop, avec un autre Dj sur des projets Breakbeats, j’ai travaillé sur un projet qui s’appelait « Breathing under water » qui avait pour idée de faire se rencontrer des gens de la scène indépendante à travers le monde pour essayer de prouver qu’il existait d’autres transversales que Paris / New-York.
Et chemin faisant, c’est au fil de toutes ces expériences que j’ai ressenti le besoin de structurer un petit peu ma pensée musicale. J’avais envie de faire un album qui me ressemble à 100%, arrêter de morceler mes projets hip hop, trip hop. Ce n’était que des parties de moi-même.
Le point de départ du projet Wax Tailor, ça a été ça, vers 2002.

Les débuts de Wax Tailor ?

Les 1ers retours sur le projet… « casse-gueule et savonnette » !

C’est ce que j’entendais à tout-va !
Que c’était un ovni, que ça ne ressemblait à rien… En gros on ne pouvait pas le mettre dans une case !
J’ai fait une grosse promo dessus, j’ai sorti mon 1er album en 2005 et la suite correspond à ce qu’on disait tout à l’heure… J’ai le sentiment aujourd’hui que les choses se sont faites selon l’angle de vue duquel on les regarde.
Certains trouvent que c’est allé vite, moi je ne le pense pas franchement, mais en tous cas c’est allé surtout sainement…. Du bouche à oreille au sein de certains réseaux, des gens qui parient entre eux…
Aujourd’hui je dirais que ma plus grande fierté par rapport à tout le parcours c’est la manière, pas forcément le résultat.

WAX_TAILOR_A1014Ton style ?

Je continue à avoir des médias qui me disent que c’est compliqué parce que c’est « spé », pas grand public etc. et c’est assez paradoxal car on voit bien aujourd’hui qu’il y a des tonnes d’exemples de disques qui sortent sur le modèle fabriqué par les maisons de disque !

WAX_TAILOR_A0971Avec le 17ème clone d’untel ou untel, avec une promo énorme, un marketing pas possible et ça ne marche pas. Ça marche une fois sur quinze et malgré tout, ces mêmes personnes continuent de penser que c’est ça que les gens attendent, que c’est ça qui est grand public alors qu’en même temps, avec trois bouts de ficelle, on arrive à créer un truc, une histoire…
Mais pour eux on continue à être « spé » et pas « grand public » alors qu’on fait des dates devant 50 000 personnes et qu’on n’a pas eu l’impression que les gens partaient en courant !
Sans démagogie, j’ai vraiment l’impression aujourd’hui que le public est plus au fait de ce qui se passe que certains professionnels.

Le public ?

Je n’ai jamais eu le sentiment de faire quelque chose de pointu mais, en particulier sur ce projet, de faire des chansons. Ça a un format pop dans le bon sens du terme, populaire, terme qui n’est pas obligatoirement signe d’avilissement, de variétés etc.

Ca veut juste dire que la musique comme le cinéma ou la littérature, véhicule des choses universelles. Je ne comprends pas le concept qu’une musique puisse être fermée à un public. Après… que ça ne touche pas des gens, c’est complètement légitime. Là on a un habillage qu’on pourrait appeler hip hop cinématique…
WAX_TAILOR_A1035Justement, ce que je regrette dans le cinéma, c’est qu’on n’a pas beaucoup de réalisateurs qui font des films « à étudier » et qui vont plaire au « grand public », à part des Tarantino mais c’était quand même plus récurrent avant dans les années ‘50 avec des Minelli, Hitchcock…
On peut autant les décortiquer que sortir son paquet de pop-corn ! Ça ne me paraît pas antinomique de faire les deux !

Importance du cinéma ?

De façon globale, la musique a plus ou moins une sorte d’évocation, des musiques s’y prêtent plus que d’autres et moi c’est quelque chose à quoi je suis très sensible dans le processus d’élaboration des titres.

Ce qui va faire le déclencheur d’un titre qui passe de la démo à un titre à terminer ou à développer. c’est alors vraiment le moment où j’ai composé un truc : ça peut vraiment être un petit deemix, une ritournelle, n’importe quoi, un petit élément qui m’ouvre une petite porte, qui m’envoie des images.
Du coup l’idée pour moi ce n’est pas de fermer l’imaginaire ou d’avoir une lecture didactique, ça a une évocation et ça laissera à chacun une porte ouverte, comme un livre, tout simplement !
C’est marrant pour le coup, car on parle souvent de cinéma, mais finalement le rapport est peut-être plus proche de la littérature.., C’est comme le livre qui est porté à l’écran avec la déception qu’on peut avoir par rapport à la représentation. Et la musique a cette force là parce qu’elle véhicule des choses qui sont complètement propres à chacun, à notre vécu, nos histoires…
In the Mood for Life est déjà le 3ème album alors avec un peu de recul et à force d’écouter les gens que je rencontre sur la route, je trouve ça extraordinaire de voir comme les gens s’approprient les titres, de voir comme ça les touche !
Certains se sont rencontrés sur un titre, d’autres font la cuisine sur un autre etc. Ca prouve la force de la musique, à quel point elle est associée à notre vie, c’est la bande-son de notre quotidien.

Dj ?

Ca a été une question centrale dès le début. Sans faire de délation, j’avais un peu peur du syndrome du Dj sur scène justement… Je ne me sens pas tellement Dj.

Comme tu le disais, le problème du Dj c’est que c’est un terme générique qui englobe tellement de réalités différentes que j’ai du mal à m’y retrouver. Quand je suis dans une « foire à tout » et que je recherche des vieux disques, je me sens Dj collecteur, par contre si on me met dans une boîte de nuit à 2 heures du matin, je vide la salle, ça c’est sûr ! Ce n’est pas mon job !
Ma casquette première c’est quand même compositeur avant tout, j’ai souvent utilisé le terme de « metteur en son ». Je suis compositeur c’est un fait mais je n’ai aucune prétention à amener quelque chose de complètement révolutionnaire en terme de mélodie, d’ailleurs je ne vois pas qui l’a fait depuis 40 ans !
On fait quand même le tour depuis Sergent Pepper au niveau mélodique.
C’est plus une façon d’accommoder la recette mais ça me semble déjà énorme d’arriver à faire quelque chose de personnel. Ce qui m’importe, c’est la vision globale de l’album au final, comme un réalisateur qui utilise toute une équipe pour faire son film, c’est l’utilisation de samples, de sons, d’assemblages, de compositions pures et dures, d’utilisations d’instrumentistes quand j’ai envie d’avoir une orchestration, d’utilisations de vocalistes quand j’ai envie d’avoir une chanteuse, un chanteur…
Je l’aborde comme ça.

Sur scène c’est assez visuel…

Par rapport au live, je dirais que c’était un 2ème volet, il y avait vraiment l’envie de me démarquer de ça, de cette vision que les gens peuvent avoir un peu stéréotypée d’un Dj. Du coup, tout de suite, j’ai voulu travailler avec des musiciens sur scène sans pour autant perdre l’épine dorsale de tout ça qui est le sampling.

J’ai gardé les machines, sur scène j’ai mes platines, mes samplers… plus la gestion d’image parce que j’ai travaillé avec Tenas qui a fait la pochette de l’album. On a travaillé ensemble sur la mise en images, on a fait des petits films, utilisé les clips pour mettre un peu en scène chaque titre.
Parallèlement, je suis accompagné par un violoncelliste, une violoniste, une flûtiste, j’ai également un MC, une chanteuse, deux MC les A State of Mmd (A.S.M) présents au Gaou, et j’ai une belle équipe technique !
WAX_TAILOR_A1028C’est le côté obscur mais c’est important car sans eux il n’y aurait pas de spectacle. Il y a aussi du décor, de la mise en scène, des lumières… J’avais vraiment envie que ce soit un spectacle et avec 3 albums c’était aussi l’enjeu de tirer une sorte de chemin de traverse entre les 3 univers, une invitation au voyage sonore !

Collaborations ?

Ca s’est fait au fil des titres… Il y a 2 types de collaborations sur l’album. Il y a celles que je qualifierais de collaboration familiale (Charlotte Savary, les A.S.M, Voice qui sont des amis) et puis celles qui ressemblent plus à un casting avec ma casquette de metteur en son.

Je fais un titre, je lui trouve une couleur… Je pense à Leave it sur cet album qui était un peu un titre challenge pour moi car je n’avais jamais vraiment fait de titre de tempo un peu plus rapide et du coup j’ai voulu faire d’une pierre deux coups.
J’ai voulu faire un petit clin d’oeil à la Motown, donner ma vision de ce que ça aurait pu être aujourd’hui et je me suis retrouvé dans la position de devoir trouver une chanteuse, j’ai contacté celle des Baby Charles, Dionne Charles, que je ne connaissais pas personnellement. Il y a eu rencontre et discussion pour que le featuring se passe bien en studio, sinon ça se sent à l’écoute.

Tes influences ?

Il y en a beaucoup !

Le point de départ a été ce que j’ai évoqué tout à l’heure, la culture hip hop avec l’âge d’or du rap américain entre ‘86 et ‘93 avec les De La Soul, Public Enemy… et dans un 2ème temps, tout ce qui avait nourri cette culture là, c’est-â-dire, soul, funk, jazz, musique de films…
Donc ça passe par James Brown, les Moody Blues (influence que je dois à mon père !)… Il y a un mélange de tout ça, c’est peut-être aussi pour ça que ma musique n’a pas d’étiquette. J’ai un grand-père qui m’a fait grandir au son du jazz, un père au son de la pop et du rock, j’ai découvert sur le tard la soul, le funk…
Une fois qu’on a digéré tout ça, on a envie de le réinjecter pour en faire quelque chose de personnel.

WAX TAILOR_A0927Mécanique de création ?

Il n’y a pas de règle absolue mais la tendance, c’est que c’est le son qui dicte la mélodie plus que le contraire..,. Je me laisse guider. Objectivement, je triture du son mais je fabrique des instruments. Pour moi le sampling c’est ça.

C’est rare que j’ai la mélodie en tête avant de commencer à travailler sur le son car selon le son que l’on a, on joue autrement, autre chose, on n’a pas les mêmes ressentis. Je bosse très longtemps seul. Autant le rapport au live implique un travail d’équipe, de discussions avec les musiciens, autant le travail en studio est long et solitaire.

Et tes projets ?

II y en a toujours beaucoup mais un surtout qui va remonter à la surface à l’automne et qui a un rapport direct avec la tournée tout en étant spécifique…

J’avais un rêve depuis longtemps, collaborer avec un orchestre symphonique, c’est très compliqué à mettre en place donc ça fait un an que je travaille dessus : trouver l’orchestre, l’ingé son, l’arrangeur tout en gardant un peu la main sur tout ça…

Ca va se faire avec l’orchestre de l’opéra de Rouen pour une série de 4 dates en novembre, Wax Tailor and the Mayfly Symphony Orchestra, avec une quarantaine de musiciens sur scène… C’est ma prochaine étape. Après ça, on m’a proposé pas mal de musiques de films donc à voir… Mais 2011 va être chargé c’est certain !

   

Photos…          Votre avis…

Rencontre aux « Voix du Gaou » à Six-Flours-les-Plages //// juillet 2010 ////
Photos réalisées et propos recueillis par Morgane L pour Le Mensuel

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