INTERVIEW
Louis Bertignac en interview
Malgré seulement une décennie d’activité à ses débuts, le groupe Téléphone aura marqué au fer rouge les esprits de plusieurs générations… Affiliés à jamais à Cendrillon, Un autre monde ou encore La bombe humaine, ses membres ne sont pas pour autant restés nostalgiques de cette époque bénie et ont continué, chacun de leur côté, à laisser libre court à leur créativité… Guitariste hors pair, chanteur et électron libre sur scène, Louis Bertignac vient d’ailleurs de sortir deux opus littéralement différents pour offrir à son public deux de ses traits de caractère. Doux et acoustique sur Origines, énergique et électrique sur Premier rang, le « Grizzly » du rock n’a cédé qu’à sa passion pour une musique qu’il exalte en concert…
« J’ai toujours peur que mes créations ne plaisent pas aux gens qui comptent le plus pour moi… »
MORGANE LAS DIT PEISSON : Deux albums sont sortis en 2018…
Louis Bertignac : Sortir deux albums aussi rapprochés, c’est assez exceptionnel pour moi qui prend en général tranquillement mon temps ! (rires) Mais je vous rassure, c’est un hasard ! (rires) Le live Premier rang n’avait d’ailleurs pas été imaginé pour devenir un album ! J’avais enregistré des concerts comme ça, pour moi, et c’est un pote qui a monté sa maison de disques – Verycords – qui a eu cette idée…
Ça vous a évité le stress de la préparation…
Oui ça a été un immense avantage ! Je n’ai pas eu à m’angoisser avant d’entrer dans un studio ni à me mettre de pression puisque tout s’est fait naturellement, avec l’énergie du public. D’ailleurs, j’ai aussi échappé à ça avec Origines puisque pour lui non plus, il n’y avait pas de projet particulier… Après la tournée des Insus, j’ai eu besoin de me remettre à bosser mais je ne savais pas encore trop quoi raconter, je n’avais pas d’idées précises alors plutôt que de rester à végéter, je me suis amusé à réécouter et traduire des morceaux qui m’avaient marqué, seulement pour « m’entraîner ». Je me suis éclaté à en faire quatre ou cinq et quand le boss de Verycords est repassé par là, il y a vu là encore une possibilité d’album ! (rires)
Deux albums nés de la même manière avec un rendu très différent…
Tout à fait, l’un est acoustique, l’autre plus rock et ça me conforte dans l’idée que j’ai peut-être enfin trouvé la façon de travailler qui me correspond ! (rires) Me conditionner à construire un album me met une pression de dingue qui me paralyse alors que faire de la musique, c’est jouer, s’amuser, créer… Je suis bien meilleur à ça alors je vais tenter de continuer à appliquer cette technique à l’avenir même si je me doute que maintenant que j’en ai pris conscience, ça risque de fausser la donne la prochaine fois ! (rires)
Et puis la notion « d’album » devient floue…
L’univers de la musique a changé, les ventes d’albums ne sont plus aussi représentatives qu’avant de l’intérêt du public et j’en viens à penser que cette forme imposée d’une dizaines de titres va finir par disparaître. On dévoilera sûrement un morceau de temps en temps sur le web et ça nous tirera peut-être tous vers le haut puisqu’on ne sortira que de bonnes chansons, pas des « bouche-trous » servant à clôturer l’objet ! (rires) Les choses changent, c’est naturel, alors il faut essayer d’en tirer le meilleur parti !
Les morceaux d’Origines…
Ce sont des titres qui proviennent d’artistes que j’ai aimés et admirés mais pour les choisir eux parmi tant d’autres, je ne me suis pas fié qu’à mes envies musicales. Il fallait que chacun d’entre eux raconte quelque chose qui ressemble à ma vie d’aujourd’hui ou à celle d’hier… J’ai connu des femmes comme celles de Dead Flowers des Stones, j’ai pensé à It’s over de Rod Stewart quand ma femme est partie avec nos deux filles et Morning has broken de Cat Stevens est un truc qui m’est arrivé après la tournée des Insus… C’est pour ça que cet album est aussi personnel bien qu’il ne soit pas un recueil d’inédits…
Deux albums qui livrent deux facettes de vous…
On est tous multiples et c’est ce qui fait notre plus grande richesse ! J’aime l’acoustique et le rock dur mais aussi la country – que j’écoute beaucoup en ce moment – et surtout je suis extrêmement curieux de tout ce qui se fait ! J’adore dénicher de nouveaux sons et partager ces découvertes avec mes proches. Par contre, je suis beaucoup plus réservé avec mes morceaux ! (rires) Je suis paranoïaque et pudique à ce sujet car j’ai toujours peur que mes créations ne plaisent pas aux gens qui comptent le plus pour moi…
© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photos droits réservés
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Interview parue dans les éditions n°405 #1, #2, #3 et #4 spéciales été 2019
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