CINÉMA
Quand la révolte d’un pays rencontre celle d’une femme au cinéma avec « La nuit du verre d’eau »
« La nuit du verre d’eau »
cinéma / drame / romance
- sortie nationale > 14 juin 2023
« La nuit du verre d’eau » : Zoom sur le Liban et ses démons d’avant-guerre
Dans son premier long-métrage en temps que réalisateur, Carlos Chahine s’est emparé d’un sujet qui lui tient à cœur : le Liban de son enfance, celui qu’il a du quitter lors de l’explosion d’une guerre civile qui durera 15 ans. Avec un casting féminin de très haute volée centré autour de Marilyne Naaman et Nathalie Baye, le film est construit sur l’écho que se font la révolte d’un peuple et celle d’une femme.
Cette femme, c’est Layla, l’aînée de trois sœurs qui passent paisiblement leurs vacances d’été dans les montagnes, à l’écart de l’agitation des villes. Layla est mariée depuis ses 17 ans avec un homme qu’elle n’aime pas. Ses deux cadettes – à qui les parents cherchent encore des époux -, ne veulent pas connaître le même destin… Mais que faire quand la société toute entière ne donne pas les mêmes droits aux femmes qu’aux hommes ? Comment se révolter quand on est déjà soi-même embrigadée par des idéaux millénaires ?
Cette opportunité d’insoumission, Layla l’entrevoit en tombant amoureuse de René (Pierre Rochefort), un jeune médecin français venu en vacances avec sa mère (campée par Nathalie Baye). Plus qu’une épopée amoureuse, cette histoire lui permet de reprendre les rênes de sa vie… ou en tous cas d’en avoir l’impression. Mais malgré tous ces chamboulements intérieurs, un phare continue à guider toutes ses décisions : son fils Charles (Antoine Merheb Harb) pour qui elle éprouve un indéfectible amour bien qu’elle soit consciente que bientôt, il fera partie de cette classe masculine qui l’opprime.
Dans ce film aussi doux que violent, Carlos Chahine passe en revue le Liban d’hier (1958) pour éclairer celui d’aujourd’hui et illustrer les origines des querelles (politiques) entre chrétiens et musulmans libanais. Il s’en saisit aussi pour distiller quelques touches autobiographiques dans les personnages du film, sa propre mère lui ayant inspiré les contours de son héroïne. Il avoue nourrir une obsession pour le thème de l’exil, celui sur lequel toute sa personnalité s’est construite. Avant ce long-métrage, Carlos Chahine avait déjà mis en image ce paradis perdu dans des courts : La route du Nord, Tchekhov à Beyrouth et Le fils du joueur.
Récompensé du prix du public lors du festival Cinémed de Montpellier et du prix du « Meilleur film arabe » au Festival du Caire, La nuit du verre d’eau – dont le titre vient d’une scène très intense entre Layla et son fils, qui l’appelle en pleine nuit parce qu’il a soif – sortira le 14 juin 2023 dans les salles et promet autant de débats que d’émotions au sein du public.
© Claire Thiebaut pour Le Mensuel / Photo DR / Le Mensuel n°443 / juin 2023
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