INTERVIEW

Interview de Catherine Lara pour Le Mensuel en 2013

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Catherine Lara

en interview 

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CATHERINE LARA

 

 

  
« Je suis amoureuse de la liberté. 

J’ai horreur des attaches, j’ai horreur des interdits, j’ai horreur qu’on m’impose quelque chose ! »

 

C’est à l’occasion d’un hommage que la Principauté monégasque souhaite rendre au poète disparu Léo Ferré que Catherine Lara, son amie de toujours, fera le déplacement. Et qui mieux qu’elle pouvait célébrer la mémoire de celui dont elle a revisité le répertoire dans son avant-dernier album Une voix pour Ferré ? Au nom de la liberté qui les a toujours unis l’un à l’autre, celle que l’on a surnommée pendant longtemps la rockeuse de diamant, leur a offert à tous deux un voyage hors du commun allant de l’Afrique à l’Espagne et qui empruntera une toute nouvelle voie à Monaco.
Car, accompagnée de musiciens Yiddish pour sa nouvelle tournée, Catherina Lara offrira de nouvelles nuances à ce répertoire immortel…

catherine-lara-en-interview-2013-portraitMorgane L. :  Vous allez célébrer le changement de nom de la Salle du Canton de Monaco qui s’appellera désormais Salle Léo Ferré. Vous avez accepté tout de suite ?
Catherine Lara : Bien sûr que j’ai immédiatement accepté cette date ! D’une part parce que j’ai une grande passion depuis toujours pour Léo Ferré qui a été un peu comme un mentor pour moi. C’est vraiment quelqu’un qui m’a beaucoup inspirée mais pas forcément du point de vue musical même si ses textes sont absolument prodigieux.

C’est le personnage qui m’a fascinée, sa façon d’être, cet espèce d’anarchiste, d’homme de liberté… J’aime beaucoup le personnage qu’il était. Et puis j’ai fait un disque il y a deux ans, un album Léo Ferré, à ma façon. J’avais réorchestré toutes les chansons que j’aimais plus particulièrement et ça a été une expérience extrêmement enrichissante que d’entrer, comme ça, plus intimement dans le monde de Ferré.

Léo Ferré disait que « le seul honneur pour un artiste était de ne pas en avoir », pensez-vous qu’il aurait aimé l’hommage que la Principauté monégasque va lui rendre ?
Je pense, car je ne peux pas penser pour lui (rires), que c’est un bel honneur, qui n’est pas du tout de la flagornerie, alors je pense qu’il aurait été touché quand même… Car même s’il faisait son bougon (rires), le bougon des Flandres, je pense que quelque part, même chez lui, il y a toujours une pointe de plaisir à être reconnu par les siens, d’être aimé… Cet hommage, c’est une preuve d’amour, ce n’est rien d’autre que ça… Il était comme tout le monde il en avait besoin et, quand on lui en donnait, il ne crachait pas dessus (rires) mais c’était un vieux bougon ! Je crois que ça faisait parti de son personnage mais c’est formidable d’avoir une salle à votre nom.

Une voix pour Ferré, vous en aviez envie depuis longtemps ?
Oui, très, très longtemps ! Ça traînait quelque part comme ça dans un coin de ma tête mais ça prend du temps de se consacrer à la vie de quelqu’un d’autre, peut-être plus que de faire nos propres albums. Il y avait longtemps que j’avais envie de m’attarder sur Léo mais d’une autre façon que la sienne. Si c’était pour faire un copié-collé, il n’y avait aucun intérêt. Je trouvais intéressant de l’emmener ailleurs et comme c’était un fou d’Espagne, j’ose croire que Léo n’aurait pas été trop déçu du voyage que je lui ai offert…

On retrouve des tonalités andalouses sur Avec le temps, des rythmes africains sur C’est extra. C’est à la fois très surprenant et magnifique, rien est dénaturé, tout est revisité…
J’ai absolument, religieusement (lui qui était athée ! rires) suivi mot à mot, harmonie par harmonie, je n’ai rien changé. Je ne me suis pas permise de changer quoi que ce soit dans sa musique, je l’ai juste emmené en voyage.

Sur scène, à Monaco, je ne pourrai pas refaire exactement la même chose car c’est un spectacle qui a été monté il y a deux ans… Depuis, les musiciens sont partis et j’ai fait d’autres choses. Je suis allée dans un monde Yiddish mais un guitariste nous apportera quand même quelques touches de cette Espagne que j’aime. Finalement, je ne le fais pas voyager, nous voyageons ensemble alors à un moment donné il sera un peu espagnol, à un autre, un peu moins.

Mais quoi que je fasse pour Léo c’est toujours du bonheur de chanter Avec le temps, c’est à chaque fois une immense joie que de chanter et de parler de La vie d’artiste. Ce sont des moments que j’adore !

Vous n’auriez pas pu reprendre n’importe quel artiste, il fallait qu’il y ait ce lien, cette admiration ?
Il fallait juste avoir envie de le faire et surtout avoir l’intime conviction d’avoir quelque chose à dire. Je dirais que je suis principalement attachée à l’émotion quand je chante Avec le temps va tout s’en va, il faut que ça sorte avec des tripes ! Et moi je suis quelqu’un de «tripale» (rires) Quand on ne trouve pas le mot juste, il faut s’inventer des trucs ! (rires) Il y a tellement à boire et à manger maintenant dans le dictionnaire… mais «tripale», ça dit bien ce que ça veut dire ! (rires)

Quel est selon vous, votre point commun avec lui ?
Je suis amoureuse de la liberté. J’ai horreur des attaches, j’ai horreur des interdits, j’ai horreur qu’on m’impose quelque chose, en ça, je pense que l’on est pareil. Je me sens plus près de lui aujourd’hui, je suis plus « anar » que jamais ! (rires) Dans un univers politique qui n’est pas très folichon dirons-nous, je ne peux qu’être « anar » mais pas dans le sens violent du terme. Je veux simplement être libre de penser, de prendre ce qu’il y a de bon chez chacun. C’est un peu comme ça qu’était Léo, un homme libre, et à mon tour, je suis une femme libre.

C’est ce qu’il nous faudrait aujourd’hui en politique, une personne charismatique capable de rassembler autour d’elle toutes les meilleures volontés sans s’occuper de leur parti politique…
On ne vit que d’interdits aujourd’hui, c’est terrible… C’est un comportement assez sectaire en fin de comptes alors que chaque parti peut avoir d’excellentes idées et plutôt que de prendre les meilleures idées de chacun, on s’enferme dans une guerre de partis ! Mais je pense qu’on arrive au bout de ce système car il est fatigué.

Il nous faudrait de bonnes volontés, désintéressées…
On a besoin de gens en qui l’on pourrait croire. Je me fiche aujourd’hui de la Gauche ou de la Droite dans l’absolu, j’ai juste envie de croire en quelqu’un d’où qu’il vienne… On a tous envie et besoin d’y croire mais là, à l’heure actuelle, on est désabusé, comme abandonné. On est dans un monde frelaté avec des histoires sordides, des dirigeants qui ont tous des casseroles au cul, c’est moche… C’est un monde moche cet univers politique. C’est le reflet d’une société de consommation qui arrive au bout de son voyage. Alors, vive la musique car au moins, elle nous permet de nous évader !
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Justement, en parlant de musique et d’évasion, à Monaco, vous nous offrirez des titres de votre nouvel album Au coeur de l’âme Yiddish dans lequel vous avez réinventé votre propre répertoire cette fois-ci ?
Je l’ai encore réinventé parce que je lui trouvais presque des racines Yiddish. Quand aujourd’hui je réécoute les nouvelles versions de T’as pas le temps ou Johan, je trouve qu’elles ont la couleur idéale, une couleur que j’ai cherché longtemps et je trouve qu’elles auraient dû être comme ça dès le début. Pour moi, le mélange de mon répertoire et de l’univers Yiddish est un mariage extrêmement heureux car je trouve que ça colle formidablement avec ma musique. En enregistrant cet album, je me suis sentie sincèrement chez moi.

Je marche au ressenti… La sensation, qu’est-ce que vous voulez, il n’y a que ça de vrai ! Il faut d’abord que je ressente une intime conviction, il faudrait presque que je pleure moi-même avant de faire verser une larme à celui qui m’écoute… J’ai besoin de ça, je ne vis que d’émotion, je n’ai que ça à revendre.

Et pourtant on vous appelait La rockeuse de diamants…
(rires) Vous savez cette chanson, en réalité, ça a été un gag et elle a marché très fort, je ne m’y attendais pas du tout ! J’ai voulu faire un rock pour me marrer et les gens ont aimé ça. Vous savez, une chanson qui marche, c’est une alchimie, c’est le bon moment, la bonne chanson, la bonne énergie, le bon texte, la bonne musique, ce sont tous ces petits paramètres et à un moment donné, ça fonctionne mais il n’y a pas de secret… Heureusement, sinon on ne ferait que des tubes ! (rires) Cest bien de temps en temps aussi de se planter ! (rires)

Et pourtant, vous avez démarré votre éducation musicale avec le violon, donc avec le classique, il en faut en passer par là, par cette maîtrise pour devenir libre ?
Exactement, parce que sinon, on limite son écriture. Le niveau musical est en adéquation avec le niveau technique que l’on a. Tant qu’on n’arrive pas à maîtriser l’instrument on ne compose que ce que l’on sait jouer donc, ça limite terriblement la création… Je crois que c’est indispensable d’arriver à bien jouer d’un instrument pour pouvoir écrire ce que l’on a envie de chanter.

Et le violon doit être très particulier, on doit ressentir toutes ses vibrations ?
Tout à fait, on l’a contre son corps. D’ailleurs, parfois, j’ai la sensation vraiment de chanter comme je joue, que les cordes du violon et mes cordes vocales ont fini par se mélanger…

Une dernière question qui n’a rien à voir avec tout ça. Pourquoi portez-vous tout le temps des lunettes ?
Pour voir, déjà c’est une bonne idée ! (rires) Mais j’aime bien être derrière mes lunettes, je me sens protégée, je me protège, c’est mon petit rideau à moi, je ne l’ouvre que pourceux qui sont très prêts de moi… (rires)



Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson
Interview parue dans l’édition n°339 de Juillet / Août 2013

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