INTERVIEW
Elizabeth Vidal
Elizabeth Vidal
ELIZABETH VIDAL
estLA CANTADORA
« C’est important pour moi d’être dans un état de totale sincérité et d’arriver à lâcher prise »
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Fuyant les préjugés et n’écoutant que son coeur, Elizabeth Vidal, la célèbre soprano, s’est lancé un défi de taille en imaginant un projet aussi fou que raisonné. En effet, celle qui, depuis son plus jeune âge, endosse les plus beaux rôles dans les opéras du monde entier, a choisi d’offrir au public un album dans lequel elle apparaît sous les traits de La Cantadora. Véritable libération de son Moi profond plutôt que simple personnage, La Cantadora reflète la facette secrète d’une artiste lyrique qui a réussi, malgré le poids de son héritage classique, à insuffler un nouveau souffle sur un répertoire que beaucoup, à tort, imaginent inaccessible. Osant mêler la pop et le rock aux oeuvres éternelles de Mozart ou de Vivaldi, la cantatrice les réinvente sans jamais les dénaturer. Habillés de rythmiques actuelles et d’un instrument incomparable qu’est la voix semble-t-il la plus haute du monde, ces chefs d’oeuvre classiques sauront séduire tous ceux qui, par crainte de ne pas y être à leur place, n’ont jamais osé franchir les portes d’un opéra…
Morgane L : Vous êtes originaire de la région alors être de passage à Nice pour la promotion de votre album L’opéra impossible est particulièrement touchant ?
Elizabeth Vidal : Pour moi, être ici aujourd’hui, c’est véritablement un retour aux sources parce que c’est ici, à Nice, que j’ai goûté la première fois aux joies des couleurs de la mer, du vent, de l’espace, de la montagne… C’est ici que j’ai appris à marcher, sur la Promenade des Anglais alors pour moi, c’est extrêmement émouvant de revenir ici pour parler de mon présent et de ce projet qui me tient tant à cœur, La Cantadora.
La Cantadora, c’est quoi exactement ? Un double, un personnage réel, imaginaire ?
La Cantadora a existé, c’était Rita la canta Ora. C’était une chanteuse espagnole des années 1920, 1930, qui était connue pour son courage vocal car elle ne refusait jamais à son public un bis, deux bis, trois bis ! Elle faisait des nuits entières de chant en se dépassant elle-même avec une générosité incroyable tant et si bien que son nom est resté dans le langage courant en Espagne. On dit par exemple, lorsque quelque chose semble impossible à faire que « Esto, lo hace solamente la canta ora ! ». Ce nom m’est resté en mémoire et un matin, il est revenu comme une évidence. J’ai donc fait des recherches sur internet, j’ai vu que cette personne avait réellement existé et je me suis dit que c’était exactement le nom qu’il me fallait pour ce projet car il me demandait beaucoup de courage vocal ! (rires)
Ce qui est déjà le cas en général dans l’ensemble de votre carrière…
Oui c’est sûr ! (rires) Mais pour celui de La Cantadora d’autant plus que j’ai vraiment voulu me dépasser et dépasser même mes limites utilisées dans le classique… J’ai voulu aller plus haut, plus sensible, plus grand, plus fort et j’ai désiré déborder aussi en termes de rythmiques puisqu’elles sont contemporaines pour la plupart.
Pour vous qui êtes habituée à interpréter des personnages à l’opéra, était-ce plus facile de revenir dans la peau d’un personnage cette fois-ci encore plutôt qu’en Elizabeth Vidal ?
Oui, parce que dans la vie, on se transforme… Tout est métamorphose… J’ai été la sage Elizabeth Vidal dans ma carrière d’opéra pendant de nombreuses années et c’est comme si en moi il y avait toujours eu cet alien rock’n’roll qui aurait eu envie de grandir tout à coup jusqu’à faire exploser Elizabeth Vidal. Là, au centre de moi, il y a cette Cantadora… Ce nom symbolise tout à fait cette transformation de ma personne qui veut vivre avec sa musique en toute liberté et peut-être casser certains codes du classique et notamment l’image de la cantatrice classique.
La Cantadora n’est donc pas seulement un personnage…
Non, en effet ! Plus qu’un personnage, la Cantadora est une partie de moi qui vient enfin au jour alors qu’elle a toujours existé. Débarquer sur une piste de danse rock’n’roll endiablé a toujours été ma chose, j’ai toujours fait ça discrètement alors que me soit désormais offert la possibilité de m’exprimer vocalement dans cet autre répertoire, c’est fantastique pour moi, c’est un magnifique cadeau de la vie, vraiment !
A quel moment avez-vous senti qu’il était temps pour vous de vous lancer dans ce projet, comment avez-vous compris que vous étiez « en droit » de le faire ?
Je crois que, tout bêtement, c’est la vie qui m’a sollicitée. Je dois dire que j’ai eu beaucoup de chance ! Je crois que quand les choses viennent, c’est que c’est leur moment. J’ai rencontré Philippe Uminski complètement par hasard. Il est venu vers moi à la suite d’une répétition que j’ai faite avec une amie à lui, Aurore Crévelier. Comme une petite fée, elle nous a mis en contact après lui avoir fait écouter une partie de la répétition. Il a été intéressé par ma voix et l’a faite écouter à Mercury. Ils m’ont contactée dès le lendemain pour que nous étudiions un projet. Celui-ci a été mûrement réfléchi puisque cette rencontre remonte à trois ans déjà.
C’était nécessaire de prendre son temps pour élaborer un projet tel que L’Opéra Impossible ?
Oui il faut du temps parce que si on prend la parole, il faut être satisfait de la parole que l’on va prendre… Il faut l’avoir réfléchie, l’avoir fait avec une sincérité qui est le reflet d’un travail mûri et c’est ça qui s’est produit. On a choisi nos musiques, on a passé du temps, Philippe s’est appliqué sur les orchestrations dont certaines ont été modifiées par la suite puisqu’il fallait qu’elles nous conviennent à tous les deux. Je n’en sentais pas certaines au départ peut-être parce que je viens de l’axe classique et que quelques désacralisations me sont parfois un peu difficiles mais en travaillant ainsi main dans la main, on a construit sereinement ce projet dans son ensemble. Même pendant les enregistrements, beaucoup de choses ont bougé, ont été improvisées selon l’inspiration du moment. L’Ave Maria que l’on a créé sur la base du Clavier bien tempéré de Bach dont s’est inspiré Gounod, a été enrichi Philippe Uminski qui a eu l’idée d’y mêler d’autres œuvres de Bach comme La première suite pour Violoncelle dont le thème répond à celui de l’Ave Maria. Je réponds à mon tour avec ma propre voix en créant une seconde voix pour faire envoler l’œuvre qui est un immense chef d’œuvre ! On voulait à la fois que les gens reconnaissent cet Ave Maria et qu’ils découvrent une touche contemporaine avec une rythmique différente et une extrapolation harmonique.
Comment avez-vous réussi à faire un choix parmi toutes les œuvres que vous avez découvert tout au long de votre carrière ?
Les choix ont été très difficiles ! J’ai fait des petits tests auprès du public et d’amis. Je leur soumettais des thèmes en leur faisant quelques vocalises pour voir s’ils les reconnaissaient et si oui, c’était le signe que ces airs là étaient rentrés dans la mémoire collective des gens même s’ils ne savaient pas toujours mettre un nom dessus. Il y a de nombreux airs classiques que l’on entend régulièrement en publicité, dans des films etc. et ça a été notre principal critère. On voulait choisir des œuvres immortelles que tout le monde connaissait pour leur donner un nouveau souffle, le souffle d’aujourd’hui. On voulait que les gens comprennent que sans Mozart ou sans Bach, la musique ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui car c’est sur leurs bases que l’on construit la plupart des choses d’aujourd’hui.
La voix apporte de l’émotion, de la sensibilité ?
La chose la plus touchante au monde, c’est la réalité d’une voix dans l’espace… Que ce soit la mienne ou une autre, la voix est notre tout premier instrument à tous. Elle a certainement dû servir à l’origine à s’appeler d’une colline à l’autre, à se retrouver, à se repérer et nous avons appris naturellement à développer cet outil qui vient du diaphragme et qui est notre tout premier moyen d’expression… C’est pour ça je crois que la voix touche autant.
Comment découvre-t-on que l’on a la capacité de chanter en lyrique ? C’est très différent du « parler », ça semble beaucoup moins naturel…
Pouvoir chanter en lyrique est un don mais pas seulement. C’est avant tout une manière d’utiliser les espaces creux… On chante avec nos creux et selon la forme intérieure donnée à notre instrument (nous sommes d’ailleurs le seul instrument modulable)… Notre instrument fait de chair se développe et se transforme à l’intérieur selon notre volonté et selon nos émotions, c’est extraordinaire ! Par exemple, on a un palais dur qui est fixe mais aussi un palais mou et selon le rapport que l’on laisse entre les deux, va se créer une dynamique, une forme qui va modifier le trajet du son. La formation chargée sur l’air va donner une autre couleur, un autre son, une autre émotion et ça c’est fantastique.
J’ai travaillé toute ma vie là-dessus comme beaucoup de chanteurs d’opéra… On cherche à trouver une spatialisation, un volume intérieur en bouche suffisamment grand pour que la voix puisse avoir une richesse. Si on chante le palais plat, on va se rapprocher de la voix parlée mais si on trouve un volume en bouche, on se rapprochera du lyrisme. C’est un phénomène qui vient de beaucoup de choses y compris de l’axe de la nuque, de la manière dont on utilise l’embouchure, par exemple, si l’on montre ses dents, on aura à l’intérieur un espace beaucoup plus plat tandis que si l’on contrôle la sortie de l’air par les lèvres, on va obtenir à l’intérieur un travail d’orientation des vibrations qui va les rendre riches, percutantes et surtout capables de remplir une grande salle sans micro. En effet, nous, chanteurs d’opéra, nous nous exprimons sans aucun artifice et pour ça, on est obligé, comme des sportifs de haut niveau, d’optimiser ce que la nature nous a donné en termes de soutien diaphragmatique puisque c’est vraiment le diaphragme qui va pousser la voix vers l’extérieur. Charge à nous ensuite de savoir la libérer en restant le plus souple possible au niveau du larynx et en ayant une diction claire.
Sur cet album, il est vrai que je me sers peu de la diction puisque je vocalise principalement sur un a (rires) mais avoir une bonne diction est essentiel. Et puis, il ne faut pas oublier que dans cette machine complexe, la zone diaphragmatique est également celle où se logent nos émotions donc tout ça se rejoint dans une seule et même voix…
Ça demande donc un travail physique mais également émotionnel ?
Oui et c’est pour ça que c’est important pour moi d’être dans un état de totale sincérité et d’arriver à lâcher prise. Quand on veut démontrer les choses, quand on veut prouver, quand on se comporte en arriviste, ça détruit notre instrument… On va peut-être moins vite dans sa carrière mais ce n’est pas ça qui est important. Ce qui compte, c’est de soigner son instrument et, comme un artisan, de le comprendre d’avantage de jour en jour. L’enseignement m’a permis de partager tout ça avec d’autres personnes passionnées elles aussi et c’est ça qui compte peut-être le plus aujourd’hui pour moi, d’avoir fait ce trajet de chanteuse pédagogue. Faire une carrière pour soi, c’est gentil, c’est bien, c’est magnifique mais je n’arrivais pas à la vivre pleinement comme ça…
Vous interprétez les plus beaux rôles et foulez les plus belles scènes du monde mais vous ne vous contentez donc pas de ça alors qu’à l’heure actuelle, nos générations ont perdu ce goût de l’apprentissage, de la transmission du savoir…
Certaines personnes y arrivent très bien mais j’avais la sensation que mon énergie ne pouvait passer que par ça, cette transmission. J’avais l’impression de devoir mériter les choses et pour les mériter il faut les connaître, il est important d’avoir le savoir-faire avant le faire savoir, alors pour être certaine de savoir faire le mieux possible, je n’ai rien trouvé de mieux que de travailler en atelier, avec d’autres. J’éprouve un plaisir fou à enseigner et ça reste quelque chose de fondamental pour moi. Ça m’a aussi permis d’apprendre beaucoup de choses moi-même en particulier sur la santé de la voix et à force d’observer les autres, de les conseiller et de les corriger, j’ai fini par progresser à mon tour. C’est ainsi que j’ai réussi à gagner encore dans les aigus, en libérant ma zone laryngée. Ça m’a permis d’atteindre de nouvelles notes mais pas pour la performance en tant que telle… Il n’y a rien d’aussi jouissif que la sensation de liberté que ces notes me procurent ! (rires)
Comment, enfant, se dirige-t-on vers le chant lyrique ?
J’ai eu des initiateurs en la personne de mes parents qui étaient deux êtres totalement différents l’un de l’autre mais passionnés tous les deux de voix et de chant. Tous les deux avaient des voix magnifiques donc depuis mon enfance, j’ai été bercée par les vibrations de la voix de ma mère qui avait une grande voix de lyrique et qui me chantait l’Air de Mimi, l’Air de Michaela, l’Air de Louise, l’Air de Thaïs… J’ai été nourrie de ces vibrations sans le savoir bien sûr car on ne comprend les choses que l’on a apprises qu’après les avoir acquises. Je pense que je me suis laissée gagner par ces vibrations et mon oreille a certainement dû vouloir reproduire ça… Je pense que c’est ainsi que j’ai essayé de conquérir mon propre corps et ma propre connaissance de moi-même au travers de la connaissance de ma voix. Cette voix m’a véritablement servie d’outil pour me connaître moi-même.
Très tôt donc mes parents m’ont inscrite au Conservatoire de Nice dans l’espoir que j’aie une voix car à l’âge de douze ans, j’avais déjà une voix très percutante qui nuisait un peu aux vibrations des chorales d’enfants donc on a fini par me mettre dans des cours de chant un peu malgré moi ! (rires) Mais ça s’est super bien passé alors j’ai commencé à chanter à treize ans au conservatoire avec Albert Lance, un ténor australien.
Et comment s’aperçoit-on que l’on a cette capacité à chanter ainsi ?
Il faut attendre la maturité sexuelle pour une voix puisqu’elle dépend beaucoup du système hormonal mais cette façon de chanter m’est apparue naturelle parce que mes parents m’avaient montré ce son et ces possibilités. Je pense que ce qui ne va pas à notre époque, c’est qu’on isole un peu la nouvelle génération de la connaissance de ce son. Or, si les enfants, avant l’adolescence, entendaient ça, ça leur semblerait bien plus naturel. Je crois que le goût pour le lyrisme est avant tout une question d’éducation. Il faut vraiment emmener les jeunes enfants à l’opéra…
Dans votre album L’Opéra Impossible, vous avez modernisé et arrangé des airs mythiques d’opéra mais avez-vous eu peur, à un moment, d’y toucher ? Se demande-t-on si on a le droit d’y toucher ?
Bien sûr que je me suis posée ces questions mais j’ai tenu à le faire pour ces œuvres. C’est parce que j’aime ces œuvres et que j’ai vécu avec elles en moi pendant longtemps, comme avec des parents proches, que j’ai réussi à avoir des attitudes moins policées, moins contraintes et que j’ai abandonné cette politesse. Ces œuvres me sont particulièrement chères, je les ai chevillées au corps mais j’ai évidemment pensé à ça avant de leur donner une petite tournure plus contemporaine. On ne peut pas dépasser de telles œuvres mais on peut les aider à s’intégrer dans le présent.
Moderniser des œuvres classiques permet de les démocratiser ? Ou en tous cas d’intéresser un public qui ne serait jamais venu à l’opéra peut-être par peur de ne pas avoir assez de connaissance ?
Exactement car en réalité, il ne faut pas de connaissances il faut juste se tenir à disposition de la musique. Je crois que ces œuvres que tout le monde connaît déjà sont parfaites pour ça, elles donnent l’impression de ne pas être du classique. Nous n’en sommes pas éloignés car nous en sommes des héritiers. Il faut avoir du respect pour ces créations car nous sommes faits d’elles, elles font partie de notre cerveau, de notre oreille, de notre corps et c’est en laissant vivre aujourd’hui qu’on se rend compte de l’importance qu’elles ont sur nous tous.
Nous n’avons donc pas à nous sentir exclus du classique ?
Tout à fait, et c’est d’ailleurs pour ça que nous avons mis sur la pochette de l’album et sur ma cape les noms des vrais compositeurs du disque qui sont Vivaldi, Mozart ou Bach. Si vous avez aimé cet album, c’est que vous aimez ces compositeurs et que votre place est au théâtre ! (rires)
On dit de vous que vous êtes la voix la plus haute du monde…
En tessiture, la voix de la soprano colorature est la voix de femme la plus haute du monde en effet mais à l’origine, « colorature » veut dire « vocalisée » et pas « chanter haut ». Ça s’est assimilé peu à peu parce que beaucoup de voix de soprano léger ont une capacité à vocaliser et que donc, par extension, elles ont tendance à monter haut. Cette capacité virtuose à monter dans les aigus attire les gens et les touche énormément car ça reste hors du commun mais il ne faut pas que ce soit la seule chose qui capte l’attention. La virtuosité pour la virtuosité ne m’intéresse pas, il faut qu’elle serve l’œuvre et qu’elle permette d’attirer l’attention ! (rires)
Comment avez-vous travaillé et pris soin de cette voix qui risque à chaque instant d’être fragilisée ?
Cette maîtrise, cette recherche m’a toujours été initiée par mon époux, André Cognet, avec qui je partage cette passion. C’est lui qui a lancé les grandes pistes de recherche qui nous ont permis d’établir un portrait de la bonne santé vocale. Je lui dois tout car on ne peut pas être chanteur sans avoir une oreille extérieure stable et constructrice comme la sienne. Il m’a permis d’avancer dans la vie avec confiance et avec le moins de risques possibles. On fatigue notre voix en endossant tous ces rôles alors une oreille aussi aimante est un véritable don du ciel.
Chanter principalement par vocalises comme c’est le cas dans l’album L’Opéra Impossible, n’est-ce pas perturbant ?
Oui, un peu, je dois l’avouer. J’ai besoin du médium des mots et ça a été une option pour cet album. Il n’y a que dans le Concerto d’Aranjuez que j’ai insisté pour avoir les paroles espagnoles même si la vocalisation est restée assez naturelle pour moi. Le rôle de la vocalise est grand. J’essaye de penser que ce son que j’essaye d’avoir le plus pur et le plus vrai possible, est comme une prière. C’est comme si par l’improvisation vocale, j’allais livrer quelque chose de moi à l’univers ou du mois demander à l’univers d’être accueillie par lui grâce aux vibrations de ma voix. Je n’ai pas eu de gros soucis pour vocaliser même si j’ai souvent envie de dire des mots ! J’ai commencé par le a sur cet album et je m’attaquerai au b sur le suivant ! (rires)
L’esthétique, dans ce projet, semble très importante. On le voit dans votre tenue, le choix de la cape, du corset, dans l’élaboration du clip de La danse du Sabre qui rappelle les plus belles publicités de parfum de luxe et les films de loups-garous… C’est à la fois sombre et étincelant…
C’est très important en effet. C’est en accord avec l’aspiration au beau… Pour moi, c’est important que les choses soient belles, surtout en ce moment. C’est vital d’avoir de hautes aspirations, d’avoir des désirs, des phantasmes, des envies. J’ai toujours rêvé par exemple d’avoir un pouvoir surnaturel pour déplacer des objets et dans ce clip, je l’ai réalisé en déplaçant la circulation, en la modifiant grâce à ma voix. C’est symbolique mais je pense qu’une voix doit toucher, remuer et donc modifier des choses chez les gens. Au début de ma carrière, je me disais que je faisais un métier futile par rapport à des médecins ou des infirmiers qui sauvent des vies chaque jour et j’en avais un peu honte parfois… Mais un jour, une femme est venue vers moi après une représentation pour me dire que son père était mort deux mois avant, que sa mère était très malade et que son enfant était handicapé mais que, malgré tout ça, elle avait réussi, le temps d’une soirée, en m’écoutant chanter, à oublier tous ses chagrins… À cet instant précis, je me suis dit que je servais peut-être à quelque chose… Ce clip est un peu le symbole de ça.
J’aime aussi l’idée que ce transgenre soit illustré par le costume. En tant qu’artiste lyrique, j’ai mis énormément de costumes XVIIIème, XIXème, de corsets alors j’ai voulu conserver ce corset comme élément esthétique classique tout en l’associant à la cape que l’on trouvait déjà bien avant Jésus-Christ. Cette cape que l’on a trouvée de tous temps dans l’histoire vestimentaire des hommes, apporte à mon personnage une sensation d’immortalité. Tantôt elle symbolise le pouvoir, tantôt elle souligne le mouvement et crée à ce dernier une seconde vie. Le corps induit le mouvement que la cape va amplifier et sublimer… C’était un élément qui m’attirait énormément. Le corset évoque donc le classique, la cape la théâtralisation et pour casser les codes, nous avons choisi des leggings, des objets très contemporains, des bracelets de toutes sortes… Ce sont des choses, des choix que je partage avec toute mon équipe et c’est extrêmement plaisant, c’est un bonheur absolu ! (rires)
Avec un travail aussi poussé sur le visuel on peut imaginer que La Cantadora débarquera un jour sur scène ?
Oui, je suis une personne de théâtre et j’ai besoin du théâtre. Je ne suis pas une personne qui vend des disques pour faire des spectacles mais une personne qui fait des spectacles et qui, éventuellement, vend des albums donc j’ai des projets de scène avec La Cantadora car j’ai un besoin viscéral de ce véhicule là…
Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel
Montage vidéo en cours par Aurélien Didelot
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