INTERVIEW

Didier Gustin en interview

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S’il croque depuis 30 ans les hommes politiques, les comédiens, les sportifs ou les chanteurs dans ses spectacles consacrés à l’imitation tant parlée que chantée, Didier Gustin a fini, à force de travail, par réussir à se faire reconnaître comme comédien par le métier autant que par le public ! Régulièrement choisi par des auteurs ou des metteurs en scène pour ses capacités d’incarnation, Didier Gustin partage désormais son temps entre théâtre et seul en scène. En tournée actuellement avec son show Inimitable qu’il alterne avec la pièce Le sommelier, l’acteur prépare déjà son prochain rôle sur les planches dans Sans rancune qui sera à l’affiche l’année prochaine…


« Je suis déçu, pire, je suis complètement résigné ! »


MORGANE LAS DIT PEISSON : En pleines tournées…

Didier Gustin : Oui ça se passe plutôt pas mal ! (rires) La pièce que je joue en ce moment avec Philippe Chevallier – Le sommelier – cartonne et j’arrive quand même à dégager du temps pour mon spectacle perso donc je dois avouer que je suis assez content !

Le sommelier

Il y a deux ans environ, Patrick Sébastien m’avait raconté le pitch de cette pièce qu’il était en train d’écrire, j’ai trouvé ça vachement bien mais il n’était pas spécialement question que je fasse partie de la distribution… C’est Olivier Lejeune qui m’a un jour appelé pour me demander de faire une lecture de la pièce et j’ai trouvé ça tellement drôle et si bien écrit que je n’ai pas hésité une seconde à me lancer dans le projet ! Ce qui m’a séduit, c’est réellement la qualité de l’écriture. Les gens s’attendent souvent à ce que le style de Patrick Sébastien soit un peu facile, potache ou graveleux alors qu’il a toujours eu une grande finesse d’esprit !

Une pièce partagée avec Philippe Chevallier…

C’est un excellent comédien qui est hyper juste dans son jeu et dans une recherche permanente de vérité. Alors même si on l’a évidemment beaucoup vu en binôme avec Régis Laspalès, son savoir-faire fait qu’il n’en a pas gardé de « mauvaises » habitudes… Il n’est pas un humoriste égoïste qui tente de donner le change en se servant des autres pour se faire valoir,  bien au contraire ! C’est un acteur extrêmement attentif à ses camarades…

Un pur boulevard avec un triangle amoureux un peu spécial…

En effet, habituellement on se retrouve avec un mari qui tente coûte que coûte de cacher sa maîtresse à sa femme alors que dans Le sommelier, mon personnage décide de les réunir toutes les deux à dîner au restaurant… C’est assez goujat comme comportement mais sans tout dévoiler, ce sont les femmes qui en ressortiront grandies ! (rires)

Tu incarnes un homme politique…

Le sommelier parle d’actualité en général et de politique en particulier ! J’incarne un député complètement hors sol qui méprise le peuple et ce qui est inquiétant, c’est que le public y reconnaît beaucoup de nos élus… (rires) Sur le style, on est un peu chez Guitry mais sur le fond, on retrouve l’ironie de Molière qui dénonçait des choses…

En tant qu’imitateur, tu te frottes souvent aux hommes politiques…

Dans mon désir d’imitation, je crois qu’il y a eu, à un moment, une volonté de les comprendre mais après 30 ans d’imitation, je dois avouer que ces hommes politiques ne me fascinent plus tant que ça… Comme beaucoup de français, je suis déçu, pire, je suis complètement résigné ! Le problème, c’est que l’ENA fabrique des gens pour les postes de pouvoir alors qu’ils devraient être occupés par de véritables personnes de la société civile qui connaissent réellement le terrain… On s’est retrouvés avec un Président sorti de nulle part qui s’est formé – en forçant un peu le trait – chez Rothschild donc on ne peut pas s’étonner qu’il aille aujourd’hui dans le sens des banques et des grands groupes comme Monsanto ! Je ressens une telle désillusion qu’au lieu d’en pleurer, je préfère rire de leurs travers…

Faire réfléchir par le rire…

Les gens ont tellement besoin de se détendre que notre premier rôle à nous les humoristes, c’est de les aider à lâcher prise mais bien qu’un spectacle ne soit pas une conférence où l’on se triture le cerveau, je crois que nos propos servent tout de même à témoigner d’une atmosphère générale et à lancer des alertes… Si le centre, la gauche et la droite ne réagissent pas rapidement, ce seront les extrêmes qui se retrouveront à la tête du pays donc il serait peut-être temps de commencer à prendre en compte la déception et le manque d’espoir des français ! Oui, Macron a été élu démocratiquement mais il ne faut pas oublier qu’il a par exemple bénéficié d’une centaine de Une de magazines, tous tenus par des grands comptes… Il a été mis en tête de gondole donc il a été plus « vu » mais ça ne signifie pas pour autant qu’il était le meilleur produit ! (rires)

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photos droits réservés


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Interview parue dans les éditions n°405 #1, #2, #3 et #4 spéciales été 2019

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