INTERVIEW

Cartman en interview

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C’est après une vingtaine d’années passées en radio et en télé à animer des émissions, à créer des parodies et à camper des personnages à la finesse toute subjective que Nicolas Bonaventure – alias Cartman – a enfin sauté le pas ! Aux côtés d’abord d’Artus dans la pièce Duels à Davidéjonatown, c’est désormais seul avec un premier spectacle intitulé « One » que le comédien goûte aux joies incomparables de la scène ! 


« J’ai pu dévoiler ma vraie personnalité… »


MORGANE LAS DIT PEISSON : Un premier one-man…

CARTMAN : Un spectacle est vraiment un moment d’intimité avec le public mais aussi une photographie de ton humeur du moment et c’est pour ça que le terme de « spectacle vivant » est si juste… Ça évolue en permanence, ça se patine, ça se nuance en fonction de l’actualité, de ton vécu, des sujets que tu as envie d’aborder et je découvre, depuis que j’ai commencé, à quel point c’est passionnant ! 

Je me suis longtemps demandé, avant de me lancer, quel était mon « truc » à moi, de quoi j’allais parler et en fait, c’est tout bête, j’ai fait mon « Kev Adams » en me lançant dans un spectacle générationnel ! (rires) Ça s’adresse évidemment à ma génération mais j’ai travaillé de manière à ce que tous ceux qui n’en font pas partie soient inclus ! Il a par exemple fallu que j’explique aux plus jeunes que si eux ont Shazam aujourd’hui pour retrouver un titre qu’ils aiment, nous, il fallait qu’on aille chanter le morceau au disquaire pour qu’il nous trouve l’album ! (rires)

Un spectacle qui parle de toi…

Plus le temps passe et plus c’est un spectacle qui me ressemble vraiment. Je me le suis approprié, je ne mens pas, je raconte des choses qui me sont réellement arrivées même si je les romance un peu, c’est une grosse partie de moi alors quand je reçois le public dans la salle, c’est un peu comme si je recevais des amis à dîner, je me sens à ma place, en confiance bien que je ne sache pas comme la soirée va se dérouler…

Mais un spectacle pas « que » sur toi…

Exactement, ça part de moi évidemment mais je voulais utiliser mon prisme – celui de Nicolas Bonaventure qui a grandi dans une cité du 93 dans les années 90 – pour finalement parler de tout le monde ! C’est l’ado d’aujourd’hui et l’adulte qui était ado en même temps que moi… Ça parle de cinéma, de musique, de télé, des premières expériences, de l’amour, des rapports que l’on a avec ses parents… 

Quand je parle des pin’s qu’on collectionnait ou des cassettes qu’on rembobinait avec un crayon à papier, ça rend nostalgique notre génération et ça fait marrer la plus jeune pour qui c’est de la Préhistoire ! (rires) Mais on a connu ça aussi avec nos parents quand ils nous racontaient qu’ils faisaient 6km à pied pour aller à l’école, qu’ils écrivaient avec un plumier et un buvard… Ça nous semblait dingue et c’est l’effet qu’on procure à notre tour désormais sur les jeunes, c’est comme ça ! (rires)

Il y a de la nostalgie mais surtout beaucoup d’autodérision et d’humour, je ne regrette rien du passé, je l’aime tel qu’il est mais je ne souhaiterais pas pour autant remonter le temps, je suis trop heureux pour ça !

Une nouvelle relation au public…

Je découvre cette complicité avec le public et elle est magique ! Certaines personnes viennent plusieurs fois ou conseillent le spectacle à leurs amis, il y a une relation affective de plus en plus forte qui se développe et c’est quelque chose que je ne connaissais presque pas avec la télévision et la radio où on ne fait que croiser rapidement les gens. La scène, c’est 1h30 d’échange et de partage, ça crée une relation privilégiée…

Une envie de « toujours » ?

C’est un peu ça mais je n’osais pas ! (rires) J’avais peur de ne rien avoir à dire, peur que les gens ne viennent pas, peur d’oublier mon texte, peur qu’ils ne rient pas… Et à un moment, c’est devenu plus fort que moi ! Je me suis finalement aperçu assez tard que c’était quelque chose d’essentiel pour moi… Ça me tenait énormément à coeur, c’est peut-être pour ça que j’appréhendais autant… Mais heureusement que je l’ai fait car c’est un plaisir complètement fou, organique, inexplicable, sensuel, humain ! Il y a quelque chose dans ton corps qui te fait comprendre que la scène est bien l’endroit où tu devais être…

Tu avais des choses à perdre…

C’est là que tu t’aperçois que tu t’embourgeoises ! (rires) J’étais dans un certain confort, une petite sécurité et je craignais de me mettre en danger. C’est en discutant avec Florent Peyre et Jarry que l’idée a commencé à faire son chemin et c’est Arthur qui m’a mis un coup de pied au… ! (rires) Il m’a dit qu’il allait produire mon spectacle et organiser le reste de mon travail pour que j’aie du temps à consacrer à la scène… En gros, je n’avais plus d’excuse valable pour repousser encore l’échéance ! (rires) Pour être honnête, ce n’est pas dans l’espoir de gagner énormément d’argent qu’il m’a fait cette proposition, c’est par pure amitié donc je crois que je ne pourrai jamais assez le remercier pour ça… Sans lui, je ne l’aurais peut-être jamais fait ! 

Monter sur scène, c’est se dévoiler…

Surtout que j’avais déjà un paquet d’étiquettes sur le dos ! Le mec de télé, le mec qui se met à poil, l’étiquette de Sébastien Patoche,  de Cauet, d’Hanouna… Quand je me lance dans un projet qu’on me propose, je me donne à 100% et c’est ce que j’ai fait avec joie à chaque fois ! Par contre, en rencontrant Arthur, tout a changé, il avait pour moi plus une vision globale qu’un « rôle » à me confier dans une émission et ça a bouleversé ma façon de travailler. Je considère d’ailleurs qu’il y a, dans ma vie professionnelle, un avant et un après Arthur. Il est expérimenté, serein et tellement bienveillant que sous son « influence », j’ai pu dévoiler ma vraie personnalité…

Une mise à nu à apprivoiser…

C’est un peu le problème quand tu n’incarnes pas de personnage sur scène… Au delà d’une question de talent ou de travail bien fait, quand les gens rient à tes vannes, tu penses qu’ils t’aiment et lorsque ça ne marche pas un soir, tu as la sensation qu’on te déteste et te rejette ! (rires) 

Ce n’est plus vraiment Cartman sur scène…

Il m’est arrivé que des gens viennent me dire qu’ils étaient venus voir le spectacle parce qu’ils aimaient bien Cartman mais qu’ils ont fini par préférer Nicolas… Je crois que c’est la chose la plus touchante que ce spectacle m’ait offert : être apprécié pour ce que je suis… Et pour être franc, je crois que je n’ai jamais été aussi heureux dans ma vie professionnelle que depuis que je fais ce spectacle !

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson en février 2020 à l’Apollo Théâtre à Paris • Photos droits réservés


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Interview parue dans les éditions n°418 #1, #2, #3 et #4 du mois d’octobre 2020

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