COUPS DE COEUR
Barbara Pravi en interview pour sa participation à l’Eurovision !
Il faut reconnaître que si l’Eurovision peut devenir une vitrine magnifique pour un artiste en lui offrant une visibilité hors du commun, il peut aussi être, dans l’esprit de nombreux téléspectateurs, synonyme de ringardise, d’étrangeté et d’exubérance ! On ne compte en effet plus, depuis 1956, les tenues saugrenues, les coiffures insolites et les chansons pour le moins énigmatiques qui ont jalonné l’histoire de ce concours passé de 7 participants à l’origine à 42 pays en 2019 ! Annulé l’an dernier pour cause de pandémie mondiale, c’est au nombre de 26 que cet évènement – non pas européen comme son nom pourrait l’indiquer mais bel et bien mondial – se tiendra ce 22 mai 2021 en direct de Rotterdam aux Pays-Bas !
Représentée cette année par Barbara Pravi, la France – qui n’a plus remporté la victoire depuis 1977 avec Marie Myriam -, sans chauvinisme aucun, semble tout à fait en mesure de figurer à la tête du classement final, bien qu’évidemment, la prudence reste de mise quand on repense à Anggun arrivée 22ème en 2012, à Serge Lama « que » 10ème en 1971 ou encore à notre Patricia Kaas nationale qui au lieu de finir 1ère en 2009, ne s’est vu attribuer que la 8ème place ! Car si le talent et le soutien d’un peuple sont essentiels pour chacun des candidats, il convient de prendre en compte les modes et les goûts des autres pays votants qui, entre la Moldavie, la Russie, L’Espagne, la Finlande ou l’Azerbaïdjan, diffèrent inévitablement !
Difficile donc de se lancer dans un pronostic très concret mais, malgré tout, certains indices – comme le fait que les bookmakers (car oui l’Eurovision attire les parieurs !) placent Barbara Pravi comme favorite – peuvent nous laisser espérer que la France tient peut-être la clef de sa revanche ! Il faut bien avouer que – que l’on soit criblé d’a priori sur ce concours ou qu’on ait l’habitude de le regarder pour se moquer (gentiment bien sûr) des participants -, la jeune femme pétillante au regard noir et mutin a tout dans les mains pour, d’une part détrôner Marie Myriam et d’autre part, se faire une place de choix dans nos playlists !
Auteure, compositrice et interprète, défenseuse du droit des femmes et amoureuse des mots, Barbara Pravi se présente certes au monde avec Voilà mais produit également des petites pépites depuis des années comme CHAIR, Louis ou ses six « Prières » que l’Eurovision va sans nul doute permettre de mettre en lumière jusqu’à ce que sorte son tout premier album prévu à la rentrée 2021…
- 26 pays en compétition : France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Pays-Bas, Lituanie, Russie, Chypre, Ukraine, Norvège, Israël, Azerbaïdjan, Malte, Suède, Belgique, Serbie, Albanie, Bulgarie, Moldavie, Portugal, Islande, Saint-Marin, Suisse, Grèce et Finlande
- Top des candidats selon les bookmakers : France, Italie, Malte et Suisse
- Le public : Seulement 3 500 personnes sont autorisées à participer à la cérémonie dans la salle dans le respect des règles sanitaires strictes
- 2020 : Pour la 1ère de son histoire, l’Eurovision a dû être annulée en raison de l’épidémie mondiale
- Eurovision et Covid : chaque candidat est tenu de présenter un test PCR négatif de moins de 48 heures avant la cérémonie. Les islandais ne participeront finalement donc pas en « physique » au concours à Rotterdam puisqu’un cas dans le groupe s’est avéré positif. Ils participeront cependant en visio
🎵 Barbara Pravi, « Voilà », chanson représentante de la France pour l’Eurovision diffusée en direct sur France 2 à 21h05 depuis Rotterdam le 22 mai 2021 • Nouvel album à paraître à la rentrée 2021
« J’ai écrit Voilà pour me présenter ! »
Morgane Las Dit Peisson : Prête à « t’attaquer » à l’Eurovision ?
Barbara Pravi : Je ne sais pas si on n’est jamais vraiment prêt à chanter devant autant de monde mais pour le moment, ça va ! (rires) Par contre, ce que je sais, c’est que dès mon arrivée à Rotterdam, je serai définitivement dans l’ambiance car mon emploi du temps va y être rythmé par une alternance de répétitions et de promo ! Le repos ne me semble pas être vraiment prévu au programme… (rires) Alors comme j’ai reçu le planning en amont, je me suis prévue dans les « trous » des petites plages de récup’ afin d’être le plus en forme possible le jour J ! Surtout que d’habitude je dors très bien et que depuis quelques jours, bizarrement, j’ai du mal à fermer l’œil ! (rires)
1ère fois que tu représentes la France à l’Eurovision mais pas la 1ère fois qu’on te propose d’y participer…
Oui mais il faut replacer la chose dans son contexte. L’Eurovision ne me voulait pas moi uniquement à tout prix depuis des années ! (rires) Il y a des directeurs de casting qui passent leurs journées à farfouiller sur YouTube, sur les réseaux ou parmi les jeunes artistes qui ont déjà sorti quelque chose pour y détecter des profils qui pourraient correspondre à The Voice, à l’Eurovision ou à d’autres émissions. Le monde de la musique est finalement un petit milieu, tout le monde se connaît un peu et depuis plusieurs années, on me demandait si ça me disait de tenter ma chance sur ce type de castings mais je refusais à chaque fois car je ne me sentais pas prête du tout !
Quel a été le déclic ?
J’ai eu l’occasion de créer deux chansons pour l’Eurovision Junior et, même si je n’étais pas vraiment aux premières loges, j’étais en contact avec les personnes de la production de France Télévisions et je me suis rendu compte que comme tout le monde, j’avais eu des a priori alors que ce sont des gens avec qui je m’entends hyper bien ! Pour prendre ma décision ça a fortement penché dans la balance car j’étais rassurée. J’ai toujours eu besoin de me sentir bien et en confiance pour travailler. Et puis, le fait de pouvoir me présenter avec ma propre chanson et mon projet artistique a achevé de me convaincre… Je suis arrivée avec ce que je suis, ce que je fais, ce que je défends, avec ma façon de parler et avec mes idées et soit ils acceptaient ce « package » non « marketé » soit ils choisissaient quelqu’un d’autre que moi ! Il était hors de question que je me travestisse pour participer à une émission car mon rêve est de sortir mon album et faire une carrière, pas de faire un buzz ou un one shot !
Ils t’ont donc « prise » comme tu étais…
Oui et je les en remercie car je sais que ce n’est pas toujours évident pour eux. Car si j’incarne « l’artistique », eux représentent le « marketing », soit deux milieux qui ne devraient pas réellement avoir à se croiser ! (rires) Mais sur un projet d’une telle envergure, l’un ne peut pas aller sans l’autre donc j’ai beau être arrivée avec des idées bien arrêtées, je mesure en permanence la chance que j’ai d’être aussi libre ! Ils me laissent faire tout ce que je veux et surtout ne m’obligent pas à faire quelque chose que je ne veux pas donc ça permet de rester sincère, heureuse et motivée !
Chanter devant des millions de personnes…
Monter sur scène impressionne souvent les gens, pas parce que c’est « extraordinaire » et exceptionnel mais parce qu’en réalité, ils ne s’imaginent pas y aller puisqu’ils n’ont pas quelque chose à proposer, ils n’ont pas ce sentiment d’urgence en eux qui fait qu’à un moment, timide ou pas, on n’a pas d’autre choix que d’y aller. La scène, c’est de l’ordre du besoin alors quand on le ressent, on ne se demande même pas si on en est capable ou pas, on y va avec, très certainement, un brin de folie ! C’est très étrange ce qu’il se passe à ce moment-là dans le cerveau mais je pense que ce sera pareil le 22 mai, peu importe le nombre de personnes derrière leurs écrans.
Il faut se déconnecter pour oser y aller ?
Ou il faut faire preuve d’une « sur-connexion » ! (rires) C’est vraiment très curieux ce qu’il se passe au moment de chanter ses chansons à un public… En fait, j’ai l’impression que c’est un mix des deux, une déconnexion du quotidien et sur-connexion au moment présent car, quand je m’apprête à monter sur scène, je me sens extrêmement connectée et sensible aux gens à qui je m’adresse… Je me sens ultrasensible à chaque sensation, tous mes sens me semblent plus développés : l’ouïe, l’odorat, le toucher… C’est hyper bizarre mais ça me transporte ! C’est d’ailleurs pour ça que même s’il ne sera pas « nombreux » à l’échelle de l’Eurovision, je suis vraiment heureuse de savoir qu’il y aura un « vrai » public dans la salle le 22 mai parce que les 200 millions de personnes derrière leurs écrans restent un concept un peu irréel pour moi, bien que mon subconscient, au vu des mauvaises nuits que je fais en ce moment, en ait pris conscience, lui ! (rires)
Être estampillée « Eurovision » aurait pu te faire un peu peur…
C’est certain mais à un moment donné, il faut faire le bilan du positif et du négatif et clairement, il y a quand même de possibilité d’en tirer quelque chose de bénéfique ! Bien sûr, si je suis mal classée, ça peut me desservir plus tard et si miraculeusement je gagnais, je resterais marquée comme Marie Myriam mais, ce que j’en tire surtout, c’est un coup de projecteur extraordinaire sur mon travail ! Ce qui est amusant, en étant baignée dedans depuis quelques mois, c’est de s’apercevoir qu’il n’y a qu’en France que l’Eurovision est un peu moqué ou pas toujours bien vu. Pour les autres pays, c’est le plus grand concours de chanson du monde ! Alors il y a de tout, des projets bizarres, des gens chelous mais il y a surtout des artistes incroyables ! Dans le passé, on a quand même vu Céline Dion, Françoise Hardy, France Gall ou dernièrement, le portugais Salvador Sobral et Duncan Laurence qui a gagné en 2019 et qui sont tout simplement exceptionnels !
L’Eurovision permet de dévoiler ton travail…
Exactement ! Ça fait 6 ans que j’essaye de faire entendre ma musique et que ça ne me permet pas de gagner ma vie ! Jusqu’au début du dernier confinement, j’étais encore serveuse pour me nourrir et payer mon loyer alors que j’ai écrit pour des tonnes de gens ! Mais si ton texte ne devient pas le single phare d’un artiste, ça ne te rapporte presque rien ! Concrètement, qu’est-ce que j’avais à perdre en me lançant dans cette aventure ? Je sais et je sens que je suis faite pour fabriquer cette matière musicale mais j’avais besoin d’un coup de pouce pour que qu’elle atteigne les gens et que je puisse enfin en vivre. Je ne désire pas gagner des millions mais j’ai besoin, pour continuer à créer, d’un minimum que seuls la vente de disques et de places de concert pourront, j’espère, me rapporter. Mes chansons étaient jusque-là très confidentielles et depuis que l’Eurovision est arrivé dans ma vie, elles ont bénéficié d’un coup de projecteur incroyable ! Je n’aurais osé imaginer que ça prendrait cette ampleur ! Donc même si je serais triste de décevoir ceux qui croient en moi si je venais à être dans les derniers du classement, je suis persuadée que cette expérience ne pourra être que bénéfique pour moi car grâce à elle, j’ai peut-être rencontré une partie de mon futur public… Je peux désormais toucher du doigt l’espoir de vendre des disques…
Une chanson : Voilà…
Je l’ai faite en me disant que peut-être, si elle était sélectionnée pour la première étape, j’aurais au moins le privilège de pouvoir la chanter devant des téléspectateurs français. Je me suis demandée ce que j’avais envie de dire à tous ces gens qui ne me connaissaient pas parce qu’ils n’avaient jamais eu, jusque-là, l’occasion de m’écouter et j’ai écrit Voilà pour me présenter ! C’est sorti naturellement et pourtant ça n’a pas été particulièrement facile de l’assumer car j’ai eu peur qu’à la place de la sincérité que j’y avais mise, les gens y voient une prétention… Elle est tellement pudique et impudique en même temps ! (rires) Avec Igit, on a dû faire une vingtaine de versions avant de parvenir à celle que je chanterai à l’Eurovision.
Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel / Photos par Shot by Bakar
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