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INTERVIEW

Alex Vizorek en interview

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À force de rire des belges en permanence, ceux-ci ont fini par prendre leur revanche sans se venger mais en investissant nos salles et nos médias pour y diffuser cet esprit, cette auto-dérision et cette distance qui parfois nous manquent cruellement à nous français ! Alex Vizorek – présent chez Michel Drucker, sur France Inter et surtout sur scène – fait partie de ces troupes de wallons que l’on adore voir nous envahir… Muni de connaissances, de malice, d’ironie, de gentillesse et de simplicité, Alex Vizorek nous offre une dernière virée dans un « musée » très singulier qui fermera définitivement ses portes en janvier prochain… Après 10 ans de bons et loyaux services à la solde des Arts, l’humoriste – suffisamment « belge » pour payer ses impôts en France alors que tout français rêve de payer les siens en Belgique – est en train de mettre sur pied sa prochaine arme fatale qui devrait voir le jour au printemps 2020…


« N’être que comédien m’aurait sûrement un peu lassé… »


MORGANE LAS DIT PEISSON : Une longue tournée qui s’achève…

ALEX VIZOREK : Il reste une petite vingtaine de dates dont le très symbolique Olympia et les trois dernières en Belgique là où le spectacle est né… Ça va se terminer en beauté dans de grandes et belles salles mais même si je sais que j’ai de la chance, c’est une sensation un peu étrange… C’est comme si j’étais en sursis alors je donne tout et je savoure encore plus…

10 ans de ta vie…

La tournée s’arrêtera exactement dix ans et un jour après la toute première d’Alex Vizorek est une oeuvre d’art… Il faut bien s’arrêter à un moment ! (rires) Je suis parti de zéro, j’ai joué dans des cafés-théâtres parisiens devant douze personnes et petit à petit, les salles se sont agrandies ! Plus ça marchait sur scène, plus les médias sont venus me chercher et plus ils ont parlé de moi, plus les gens ont voulu voir le spectacle alors j’ai tourné un peu partout pendant dix ans ! 

Une jolie ascension…

J’espère qu’il y a encore des marches au dessus ! (rires) Ça s’est fait « tranquillement » bien que dix ans, ce ne soit pas énorme non plus… Je n’ai jamais rêvé d’un succès foudroyant, j’étais prêt à prendre le temps, j’avais très envie que ce métier devienne le mien et que je puisse en vivre. Au bout de deux ou trois ans, quand mon banquier a arrêté de me regarder avec son petit regard suspicieux, j’ai pu estimer que « comique » était réllement devenu mon travail ! (rires) Et puis chaque année a ensuite apporté son lot de surprises jusqu’aux Molières ! Ça a été l’apothéose pour moi petit belge monté à Paris pour faire du théâtre ! La classe ultime ! (rires) Du coup, je suis curieux de savoir ce qui m’attend maintenant même si je suis conscient d’être arrivé beaucoup plus haut que tout ce dont j’avais osé rêver… 

Il y a eu Trois hommes et un couffin

Ce n’était pas évident de passer après le film mais je me suis énormément amusé avec Ben et Bruno Sanchez. J’ai aimé l’idée que cette pièce soit éphémère. Elle n’avait été programmée que dix jours sur Paris pour être diffusée en direct sur France 2 et même si je l’aurais bien jouée quelques soirées supplémentaires, je ne suis pas certain que j’aurais apprécié partir longtemps en tournée avec… Après avoir été auteur et seul sur scène pour recevoir tous les applaudissements et toute la recette (rires), n’être « que » comédien m’aurait sûrement un peu lassé…

Désormais producteur…

J’ai découvert à Paris La convivialité, une conférence-spectacle drôle imaginée par deux vrais linguistes belges ! Ils y parlent d’un sujet qui angoisse terriblement les français : l’orthographe ! (rires) La langue française est truffée de difficultés et de pièges cocasses, improbables ou injustes ! D’un côté, personne ne peut expliquer pourquoi « chou », « genou » et « hibou » prennent un « x » au pluriel plutôt qu’un « s » et de l’autre, « nénuphar » se retrouve avec un « ph » à la place du « f » uniquement parce qu’un académicien s’est réveillé un matin en se disant que ce serait bien que ça fasse un peu grec alors que ça vient de l’arabe ! (rires) L’idée du spectacle est que, puisqu’on est jugé sur l’orthographe, on est en droit de juger son bien-fondé ! (rires) 

C’est intelligent et grand public, ça m’a immédiatement plu alors j’ai proposé de le coproduire pour le faire tourner en France. Et puisque je ne suis pas très bon en commerce, j’ai créé une super petite équipe pour encadrer Arnaud Hoedt et Jérôme Piron et moi je regarde tout ça de loin ! (rires) Je serais super fier que ça marche mais je pense que ce sera ma première et dernière en tant que producteur…  Ce sont des angoisses dont je n’ai pas l’habitude, j’ai mis toute la maison en hypothèque alors il y a intérêt que ça fonctionne ! (rires)

Ton premier spectacle parle d’art…

Et tu ne connaîtras pas le sujet du second maintenant ! (rires) En même temps l’attente ne sera pas très longue puisque je vais ré-attaquer les petites salles belges dès le mois d’avril… Pour Alex Vizorek est une oeuvre d’art, j’étais sûr que le thème pouvait fonctionner mais porté par un inconnu comme je l’étais au début, c’était ultra casse-gueule ! (rires) À partir de quatre ou cinq ans d’exploitation, les gens ont fini par venir parce qu’ils savaient que c’était moi alors qu’au début, je devais passer mon temps à les convaincre… Ceux qui ne m’aiment pas ne viennent toujours pas mais ceux qui m’aiment bien viennent de bon cœur car ils savent sur « quoi » il vont tomber. C’est la preuve qu’ils ont envie de rire sur des sujets non pas compliqués mais instructifs… Comme quoi, rire et réfléchir en même temps n’est pas incompatible !

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson au Théâtre de Grasse • Photos Mehdi Manser


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Interview parue dans les éditions n°408 #1, #2, #3 et #4 de novembre 2019

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