INTERVIEW

Manu Payet en interview

By  | 


Votre évènement n'apparaît pas dans l'agenda de notre appli ?

Soumettez-le nous GRATUITEMENT ici !


 

 

Après avoir mis fin à son deuxième seul en scène, Manu Payet a choisi de débuter 2020 en s’illustrant dans une comédie piquante, sarcastique et malheureusement très réaliste… Imaginé par cinq réalisateurs – Tristan Aurouet, Thomas Bidegain, Marc Fitoussi, Cyril Gelblat et Vianney Lebasque – mettant en scène dans diverses tranches de vies nos addictions aux technologies numériques, le film Selfie propose des visions aussi hilarantes qu’effrayantes de notre relation souvent trop fusionnelle avec des smartphones et des réseaux sociaux devenus en quelques années une sorte de prolongement de nous-mêmes… 

 

 

Manu Payet

Manu Payet, Selfie : Cinéma / 15 janvier

1ère partie d’interview à retrouver dans Le Mensuel d’octobre 2019 n°407 ou sur www.le-mensuel.com

 


« Être comédien, ce n’est pas « bien jouer », c’est être, c’est incarner, c’est devenir… »


Il y a la scène mais aussi le cinéma…

Manu Payet : Il y a d’ailleurs un film – Selfie – dans lequel j’ai tourné qui sortira le 15 janvier prochain. C’est une comédie super grinçante sur notre rapport aux nouvelles technologies. Il se présente comme un film à sketches un peu sur le principe des Infidèles sauf que ceux-ci sont liés les uns aux autres. J’ai pu découvrir la version montée et en toute franchise, je l’ai trouvée formidable ! 

Un film choral…

Ce n’est pas parce que j’y ai participé mais sincèrement, c’est un film à voir ! À condition de ne pas avoir moins de 7 ans ! (rires) Les acteurs sont géniaux et les cinq réalisateurs qui ont collaboré ont fait un travail remarquable, que ce soit sur la mise en scène, la direction des comédiens ou la mise en valeur du scénario… On y retrouve Blanche Gardin, Max Boublil, Elsa Zylberstein qui est surprenante dans son rôle, Sébastien Chassagne avec qui je joue ou encore Julia Piaton qui interprète ma femme… J’ai hâte de savoir ce que le public va en penser !

Le contact humain…

C’est ce qui m’a toujours animé et dans 100% libre, je m’amuse d’ailleurs beaucoup à échanger avec les gens. Je suis curieux d’en apprendre un peu plus sur eux car c’est grâce à eux que le spectacle n’est jamais le même d’une ville à l’autre. Cette interaction n’est pas un « danger » pour moi mais une véritable respiration car le risque sur scène, ce n’est pas d’improviser, c’est d’y aller avec un spectacle boiteux !  (rires)

Voir le film c’est se regarder…

Quand je « fabrique » le film, que ça tourne, j’aime bien savoir ce qui va et ne va pas alors j’ai tendance à décortiquer un peu les rushes avec les réalisateurs et je me fous de me voir, je ne me considère que comme une matière que j’utilise pour arriver à des fins cinématographiques ! (rires) Par contre je ne fais pas partie de ceux qui s’admirent dès qu’ils passent à l’écran ! (rires) Au contraire, je trouve que c’est plus compliqué de se voir à ce moment là parce que, qu’on soit satisfait ou non de notre jeu, on est complètement impuissant et on ne peut plus rien retoucher ! C’est le gros désavantage du cinéma par rapport à la scène où l’on peut tout refaire chaque soir si on le souhaite.

Se mettre au service d’un réalisateur quand on a l’habitude d’être libre ?

Bizarrement j’aime bien, à condition bien sûr que le projet en question m’interpelle et me séduise… J’aime bien cette idée d’être la projection de la vision d’un créateur. Cyril Gelblat – qui a réalisé le segment de Selfie dans lequel je suis et qui avait également fait Tout pour être heureux – est par exemple typiquement quelqu’un avec qui il se passe vraiment un truc quand on travaille ensemble. Je l’écoute énormément car ça marche très bien entre nous et surtout parce qu’il a une réelle patte…

Et contrairement à ce que tu proposes sur scène, au cinéma tu deviens quelqu’un d’autre…

Ça j’aime énormément ! Sur scène, tout n’est pas moi à 100% et évidemment, c’est interprété mais c’est vrai que ça part tout de même de ma propre vie et de ma personnalité… C’est très agréable de changer de peau et de se glisser dans un rôle de composition. Pour Emma Luchini dans Un début prometteur, j’ai joué un auteur alcoolo et j’ai trouvé ça passionnant !  Même si le personnage à incarner n’est pas le plus positif du monde, il te permet de prendre des vacances de toi-même et ça, c’est un concept qui me plait ! (rires)

C’est finalement plus facile que d’être soi ?

En tous cas, au cinéma, j’aime l’idée de m’éloigner de moi et de ce que je suis… D’ailleurs, je crois que je serais incapable de travailler différemment. Dans Radiostars par exemple, j’avais demandé à Mathieu Oullion et Romain Lévy – qui ont écrit le film – de retoucher le texte en ce sens car mon personnage était beaucoup trop « moi », je ne voyais même pas comment l’aborder… Impossible de m’écouter moi-même quand je parle ou d’analyser mon propre comportement quand je me déplace… C’est tellement plus simple et surtout plus intéressant d’observer les autres, tous ceux que je ne suis pas, pour essayer de les comprendre. C’est cette démarche là qui est passionnante et hyper enrichissante ! Tu apparais évidemment dans les personnages que tu incarnes mais par petites touches parfois inconscientes et parfois savamment dosées… Je me rappelle que pour donner corps à l’auteur alcoolique et désabusé, j’avais tellement travaillé son comportement que, lors du premier jour de tournage, Emma Luchini a pris peur ! (rires) J’avais complètement oublié dans ma démarche qu’elle m’avait tout de même choisi moi à l’origine…

Un juste dosage…

Il faut préparer son rôle pour être bien et efficace mais il ne faut surtout pas oublier de lui donner une âme et une vérité. Être comédien, ce n’est pas « bien jouer », c’est être, c’est incarner, c’est devenir… Certains, comme DiCaprio, y arrivent à la perfection sans donner l’impression que ça leur a demandé un quelconque effort… L’avantage, quand tu n’es pas à son niveau (rires), c’est qu’au cinéma tu peux refaire jusqu’à temps d’obtenir le meilleur résultat possible !

 

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson à l’occasion de son passage au Théâtre Le Colbert de Toulon • Photos Mathieu Hoareau


Interview parue dans les éditions n°410 #1, #2, #3 et #4 du mois de janvier 2020

You must be logged in to post a comment Login