INTERVIEW

Régis Laspalès en interview

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Bien qu’il leur soit évidemment arrivé ces trente dernières années de s’offrir quelques escapades théâtrales et cinématographiques en « célibataires », imaginer Philippe Chevallier et Régis Laspalès l’un sans l’autre autrement qu’occasionnellement aurait presque pu tenir de la science-fiction… De sketch en sketch, de two-men-show en two-men-show, le duo infernal que l’on aurait presque pu prendre pour un vieux couple ou des frères siamois a créé la surprise en nous rappelant à très juste titre qu’ils n’étaient en réalité que deux artistes qui, comme tout artiste, étaient assoiffés de nouveauté et d’aventures. Mettant sur pause leur célèbre numéro de duettistes pour s’adonner à leurs envies personnelles, les deux amis se sont donc dirigés vers deux activités scéniques des plus opposées ! Alors que l’un a choisi de s’attaquer au délicat exercice du seul en scène, l’autre lui a préféré l’esprit de troupe… À l’affiche de la dernière pièce de Laurent RuquierÀ droite, à gauche – qui ne désemplit pas depuis sa première il y a plus d’un an, l’incomparable guichetier de la SNCF qui avait du mal à trouver un train pour Pau s’est glissé avec une véritable aisance dans un rôle d’ouvrier chauffagiste de droite défendant ses opinions politiques face à un client de gauche et artiste. Rappelant une nouvelle fois qu’en tant que véritable comédien, il possède toute une large palette de jeu, Régis Laspalès pourrait surprendre ceux qui se demandent encore de quoi il est capable en dehors de l’hilarité que l’univers absurde mis sur pied avec Chevallier a provoqué en nous depuis trois décennies…


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« À droite à gauche » au Cannet le 16 janvier et à Marseille le 17 janvier

 


« Je me sens chez moi sur scène… »


Morgane Las Dit Peisson : Au moment où l’on se parle, vous êtes à quelques minutes de monter sur scène…

Régis Laspalès : Je n’ai jamais été trop sujet au trac, je ressens plutôt à chaque fois une furieuse envie d’y aller ! Je me prépare mentalement, je tourne en rond derrière le rideau, j’écoute le public s’installer, la rumeur qui va nous donner des indications sur le comportement des gens… S’ils sont bruyants par exemple, c’est peut-être qu’ils seront expansifs… Mais dans tous les cas, j’ai hâte que le rideau s’ouvre car je me sens chez moi sur scène. Quand je maîtrise les choses, elles ne me font pas peur.

C’est curieux car chaque soir le public, qui ne se connaît pas, crée une atmosphère particulière…

C’est vrai que c’est un phénomène amusant car on rassemble des gens qui ne se connaissent pas et qui viennent pourtant « communier » ensemble autour d’un artiste ou d’un genre qu’ils aiment bien et ce point commun les poussent à interagir inconsciemment les uns avec les autres. D’ailleurs, quand on les rencontre à la fin de la pièce, ils parlent souvent de ce qu’il s’est passé dans la salle et de l’ambiance qui y régnait. C’est pour ça que même une excellente captation ne pourra jamais recréer la magie d’une représentation. Le théâtre est un art vivant qu’il faut vivre et ressentir.

À droite à gauche s’achèvera le 15 février prochain…

Cette pièce a connu un tel succès depuis son commencement qu’elle s’achèvera sur Paris le 15 février prochain en s’offrant un direct à la télé ! On l’a jouée au moins 200 fois sur Paris avant de partir un peu partout en tournée et honnêtement, quand ça marche aussi bien que ça, on ne peut pas s’en lasser ! Ça surprend d’ailleurs toujours les gens que l’on puisse interpréter longtemps le même texte alors que si l’on y regarde de plus près, tout le monde, dans son métier, fait plus ou moins la même chose chaque jour ! (rires)

Toujours la même pièce mais avec différents partenaires de jeu…

J’ai débuté À droite à gauche avec Francis Huster qui avait déjà signé une autre tournée auparavant et qui s’est fait remplacer par Jean-François Balmer sur Paris. Ce sont deux acteurs merveilleux, très différents et du coup, ça a été marrant pour moi d’alterner car ça a justement cassé la routine. Ils n’ont pas tout à fait la même manière de jouer alors c’était intéressant aussi de m’adapter à eux.

On doit cette pièce à Laurent Ruquier pour qui vous aviez déjà joué Landru…

J’aime l’écriture de Laurent Ruquier car elle est très fluide. Quand il m’a confié ce texte, je l’ai lu d’une traite, il m’a immédiatement plu et puis ce rôle me collait parfaitement à la peau, il avait été taillé pour moi, sur mesure ! Bien sûr, la sortir au moment des élections présidentielles était opportuniste car son titre interpelait les gens mais à part quelques répliques qui font mouche disséminées çà et là comme des clins d’oeil, cette pièce n’a rien à voir avec un spectacle de chansonnier. C’est là où il est très fort car, hors élections, sa pièce fonctionne toujours autant.

C’est une pièce sur les différences…

En effet, la confrontation droite gauche est surtout un prétexte pour aborder le thème des apparences car bien souvent, l’autre n’est pas celui que l’on croit… Ça fait réfléchir sur les différences, sur l’intolérance, sur les préjugés et c’est ça qui fait de Laurent Ruquier un grand auteur de théâtre. À travers sa dizaine de pièces – qu’il évoque la vieillesse, la presse ou les dérives de la chirurgie -, il arrive toujours à s’adresser aux coeurs des gens.

Avec Francis Huster, vous êtes différents mais semblez vous rejoindre sur le labeur et la précision…

C’est très bien observé car s’il est évident que l’on est tous les deux différents, il est très vrai aussi que l’on se ressemble beaucoup dans notre approche du théâtre. On aborde notre métier de la même manière bien qu’on ait des « emplois », des types de rôles plutôt opposés. Et puis, ça a été un plaisir de travailler avec le binôme qu’il forme avec Steve Suissa qui a signé la mise en scène. Ce sont tous les deux des gentlemen efficaces, agréables et toujours de bonne humeur.

Il y a vos aventures théâtrales mais aussi votre mythique duo avec Philippe Chevallier…

Oui on ne s’est pas « quittés » mais faire une pause après plus de 30 ans de duo, ça ne peut nous faire que du bien même si on est toujours aussi amis ! Le temps passe vite et on a parfois un peu oublié qu’on avait tous les deux d’autres envies, comme tous les artistes, et qu’il était grand temps de les assouvir… Moi je rêvais de théâtre et Philippe a eu le courage de se lancer seul en scène. On est heureux ainsi pour le moment alors il faut juste laisser le temps aux gens de s’habituer…

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photos droits réservés

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