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Laurent Voulzy en interview pour Le Mensuel en 2012

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Laurent Voulzy


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en interview 

interview-laurent-voulzy-2012   

 


LAURENT VOULZY
 
 
 


Interview réalisée au Palais des Festivals de Cannes en 2012

 

« Plein de choses insolites et étranges sont arrivées pendant l’enregistrement de cet album… »

(Son en cours d’intégration)

« Chi va piano va sano »… C’est sans doute dans ce proverbe italien que Laurent Voulzy a trouvé la clef de son succès ! Ayant compris que la surproductivité ne pouvait pas rimer avec qualité, l’artiste a préféré se faire rare pour nous présenter uniquement le fruit d’un travail sincère et consciencieux.
Et c’est ainsi que, dix ans après son dernier album original, il a choisi de revenir avec une création pleine de charme et d’originalité, « Lys and Love », dans laquelle il a osé le mariage audacieux du Moyen-âge et de la modernité.

 

interview-laurent-voulzy-2013Morgane L :  Votre dernier album « Lys & Love » remporte un franc succès auprès du public grâce à des sons electro mêlés à une ambiance médiévale. Comment est née cette idée ?
Laurent Voulzy : Je vis avec le Moyen-âge depuis que je suis enfant. Ça fait partie des choses qui me passionnent sans trop même savoir pourquoi. J’avais envie de faire un album electro et j’ai décidé de partir en studio sans rien avoir ecrit. J’avais déjà eu des expériences comme celle-ci sur « I want you » ou encore avec « Sous la lune » qui partait dans des flâneries avec un son très electro et des choeurs. J’avais envie de faire un album comme ça… J’en ai parlé à Alain (Souchon) et c’est lui qui m’a donné l’idée de prendre des poèmes que j’aimais pour les mettre en musique. Sur le coup, pour être franc, ça ne m’a pas tellement emballé… (rires) Mais quelques heures plus tard, j’ai pensé aux poèmes médiévaux…

Et comment crée-t-on un tel mariage ?
Je me suis dit que le contraste allait être extraordinaire, que ça allait donner du classicisme à la musique electro et un peu de modernité aux poèmes médiévaux. On est entré en studio avec Frank Eulry avec qui j’ai fait les arrangements et on a créé les ambiances petit à petit. Mais très vite, le naturel a repris le dessus et j’ai commencé à faire des chansons, de la pop sans trop savoir où j’allais. C’était la première fois que ça m’arrivait mais je me suis laissé embarquer.

Où nous emmène cette passion pour le Moyen-âge ?
Dès le début, j’ai voulu me laisser guider par le fil conducteur, le Moyen-âge et ça s’est très vite axé sur la France et l’Angleterre, les deux pays où je vis depuis huit ans déjà. Donc c’etait bien avant les 75% ! (rires) Avec ma femme, on admire autant la France que l’Angleterre et je dois même avouer que j’aime de plus en plus ces deux pays lorsque je m’en éloigne tour à tour. Je désirais depuis longtemps vivre entre ces deux patries donc c’est un rêve qui se réalise !

De quels poèmes vous êtes-vous inspiré ?
Je me suis dit que j’allais m’inspirer des poèmes de Charles d’Orléans mais je n’en ai finalement retravaillé qu’un seul qui a donné naissance à « Ma seule amour ». J’ai recréé un texte en essayant de respecter au maximum ce qu’il avait ecrit. Il était prisonnier en geôle et moi prisonnier par amour.

Les enregistrements se sont faits dans studios Abbey Road ?
L’enregistrement de l’album s’est fait en grande partie dans mon studio près de Paris mais on a enregistré les cordes et les cuivres à Abbey Road. C’etait un rêve depuis toujours et là, c’était formidable pour moi car cet album est pour moi à la fois un hommage à la France et à l’Angleterre, une passion amoureuse pour le Moyen-âge et une passion pour l’amour tout court. C’était le moment idéal pour moi de me retrouver là-bas et ça a été bouleversant de monter les marches de ce studio !

Et les choeurs ont été enregistrés dans le donjon du Château de Vincennes ?
Exactement. On a enregistré une chorale dirigée par Alexander Martin qui est actuellement le chef de choeur de l’Opéra de Bordeaux. Ce qui est amusant, c’est qu’à peine arrivés dans le donjon pour enregistrer le titre « Ma seule amour » dont le texte originel avait été ecrit par Charles d’Orléans, on a appris qu’il avait été construit par son grand-père ! C’était assez émouvant pour moi de me dire que l’homme qui était le grand inspirateur de l’album, était certainement venu voir son grand-père dans ce château et ce donjon… Plein de choses insolites et étranges sont arrivées pendant l’enregistrement de cet album.

Et en tournée aussi cet album vous a permis d’investir d’autres lieux chargés d’Histoire…
Oui, on a joué dans des lieux magiques comme des cathédrales ou des basiliques. Pour moi, c’est extraordinaire ! J’adore aller dans les églises, les chateaux, j’aime visiter des monuments car même si je suis résolument de mon siècle, j’ai une attirance pour le passé et les beaux monuments.

On connaît votre attirance pour la spiritualité…
Oui ! Et je la cherche encore ! (rires) C’est une quête, j’aimerais savoir donc j’essaye de lire des mystiques pour percer le mystère. Je me dit il y a des gens surdoués sur terre pour plein de choses alors il est logique que certaines personnes aient un accès supérieur à la spiritualité. Tous les grands mystiques ont une chose en commun, qu’ils soient chrétiens, juifs ou musulmans, ils arrivent toujours à un stade où ils écrivent des poèmes pour exprimer une sorte d’illumination qu’ils auraient eu… Je les lis car ça me réconforterait d’avoir une certitude.

C’est quelque chose que l’on retrouve dans vos albums ?
Oui et non… Je l’évoque un peu. Je ne peux que poser des questions en musique et laisser les gens y répondre. Ça fait trente deux ans maintenant que j’ecris mes rêves en quelque sorte car le monde des rêves me passionne. J’ai d’ailleurs un projet, qui ne sera pas forcément un album, qui tournera autour de ça… C’est un projet que je rumine depuis un moment et qu’il me tarde de faire ! D’ailleurs, quand j’ai attaqué « Lys and Love », j’ai longuement hésité avec ce second projet.

La spiritualité a pourtant nourri la chanson phare de cet album, non ?
Oui c’est vrai, on la retrouve dans « Jeanne ». C’est un prénom que j’ai entendu à trois heures du matin alors que j’étais en train de chercher des paroles. Ça m’arrive souvent, comme à beaucoup, au moment où je m’endors, j’ai l’impression de tomber dans le vide ou parfois d’entendre des choses. Alors je les note et souvent, ces choses se sont produites par la suite. Ça arrive à plein de gens mais je pense qu’ils ne prennent le temps d’y faire attention. Cette nuit-là j’ai entendu le prénom Jeanne alors que ça faisait plusieurs jours que je désirais trouver les paroles de cette chanson. Je suis tombé de sommeil devant mon ordinateur et je me suis fait reveillé par ce mot… Il m’a plu alors qu’il avait été banal pour moi et d’un seul coup il est devenu majestueux, il s’est illuminé.

Peut-on y voir un rapport avec Jeanne d’Arc ?
Je ne sais pas vraiment mais je pense que oui… Mon album est inspiré par Charles d’Orléans, qui connaissait suffisamment Jeanne d’Arc pour lui avoir fait acheter une robe alors qu’il était en prison en Angleterre… Peut-être qu’inconsciemment il y a un lien dans mon esprit. Il y a plein d’autre Jeanne, comme Jeanne de Flandre par exemple… Mais je pense qu’au fond de moi, c’était Jeanne d’Arc.

Peut-on parler d’une synchronicité entre tous ces faits ? Entre l’enregistrement au Château de Vincennes et celui dans le studio des Beatles, Jeanne, Charles d’Orléans, la France, l’Angleterre etc. Croyez-vous qu’il existe justement des liens ?
Je crois que oui… Depuis « Rockollection », j’ai toujours mis de l’anglais dans mes morceaux, j’ai toujours eu envie d’Angleterre. Il se trouve aussi qu’entre la France et l’Angleterre c’est une grande histoire de guerre et d’amour qui date du Moyen-âge et de la Guerre de Cent Ans, voire même d’avant avec Guillaume le Conquérant qui était allé conquérir l’Angelterre ! Il y a donc une histoire extrêmement forte entre la France et l’Angleterre. Il y a toujours eu une fascination réciproque entre ces deux pays, une fascination que je partage. Je pense réellement qu’il y a une raison pour que cet album se soit imposé à ce moment-la de ma vie. Ça ne peut pas être totalement dû au hasard, je n’arrive pas à savoir pourquoi exactement mais il y a eu beaucoup trop de choses étranges qui sont arrivées sur cette album… L’histoire de Jeanne, l’enregistrement des choeurs au Château de Vincennes jusqu’au croassement du corbeau qui débute le morceau « Glastonbury ». Il y a un endroit très mystérieux en Angleterre, dans le comté du Somerset, qui s’appelle Glastonbury et qui serait lié à la légende du roi Arthur. J’ai voulu y enregistrer les vrais corbeaux qui y sont célèbres mais je n’ai jamais trouvé le temps… Jusqu’au jour où, à trois semaines de la fin de l’album, ma belle-soeur me raconte qu’elle a rencontré une femme qui vit à Glastonbury et qui a, dans son jardin, chaque matin, trois corbeaux qui se battent, qui jouent et qui croassent ! Son mari était musicien et avait alors tout le matériel pour les enregistrer et c’est ainsi que vingt quatre heures avant de terminer « Lys and Love », j’ai pu ajouter les corbeaux, auxquels je tenais, sur ce morceau.

Et il y a un duo sur « Ma seule amour »…
Oui et là encore, ça a été très spécial ! (rires) Cela faisait des semaines que j’essayais de contacter Roger Daltrey (le chanteur des Who) avec qui j’avais en projet de faire quelque chose depuis longtemps et ça a été miraculeux car dans les dernières vingt quatre heures, j’ai reçu le son des corbeaux et la voix de Roger Daltrey pour finaliser l’album ! 


Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel
 
Interview parue dans Le Mensuel n°333 – Janvier 2013

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