CINÉMA
« Emilia Perez » : le nouvel Audiard qui a secoué la Croisette sort en salle
Emilia Perez de Jacques Audiard
cinéma / drame / comédie musicale / thriller
- sortie nationale le 21 août 2024 / 2h10
Emilia Perez : La dernière (sublime) audace d’Audiard
Il y a des concepts qu’on imagine mal côte à côte : la violence des cartels de drogues dures au Mexique vs la détresse affective et émotionnelle d’être née femme dans un corps d’homme… Il fallait au moins toute l’audace du réalisateur Jacques Audiard pour construire un film sur ces deux antinomies. Et comme si le défi de faire rentrer dans 2 heures et quelques toutes ces contradictions n’était déjà pas assez costaud, le scénariste en a fait une comédie musicale. Qu’on aime ou pas Audiard et ses prises de position toujours tranchées, il faut voir Emilia Perez, ne serait-ce que pour être capable d’en parler et d’en débattre ! En salle à partir du 21 août.
Rita est avocate dans un cabinet mexicain qui a fait du blanchiment des chefs de cartels son fonds de commerce. Un jour « kidnappée » par l’un d’eux – Manitas -, elle reçoit une mission des plus inimaginables : aider le criminel à recommencer une nouvelle vie et devenir ce à quoi il a toujours aspiré : être une femme. La transformation enclenchée, les destins de Manitas et de Rita sont à jamais liés et seule l’avocate dans la confidence permettra à celle qu’on appelle désormais Emila Perez de retrouver sa femme et ses enfants.
Au-delà de son scénario à couper le souffle, le film a fait couler beaucoup d’encre lors du dernier Festival de Cannes quand l’actrice trans Karla Sofía Gascón a reçu le prix d’interprétation féminine, partagé avec les actrices principales du film (Selena Gomez, Zoe Saldaña et Adriana Paz). Il faut dire que comme à son habitude, Jacques Audiard a choisi de traiter un sujet puissant et à la marge, celui de destins qui doivent se réinventer et qui bouleverse les équilibres de la bien-pensance (Un prophète, De rouille et d’os, Dheepan…). En effet, Emilia Perez pointe du doigt la société mexicaine – mais qui pourrait être élargie à bien d’autres schémas socio-culturels de par le Monde – où il est préférable pour un homme d’être aspiré dans une spirale d’ultra violence plutôt que d’avouer soit son homosexualité soit son trouble de genre.
Pour casser définitivement les frontières, Jacques Audiard, le chorégraphe Damien Jalet et le compositeur Clément Ducol ont inventé une comédie musicale, sans caricature, dans un contexte noir et violent peu compatible avec les entrechats. Et pourtant, tout fonctionne comme si ça avait toujours été une évidence…
© Claire Thiebaut pour Le Mensuel / photo DR / été 2024
↵ Retour vers la rubrique « cinéma »
You must be logged in to post a comment Login