INTERVIEW
Jean-François Zygel en interview
Véritable phénomène dans le monde de la musique classique, Jean-François Zygel – compositeur, pianiste, improvisateur, présentateur mais aussi professeur – a, en partie grâce à ses émissions de radio et de télé, aidé à une certaine démocratisation de ce genre musical qui a malheureusement trop souvent tendance à effrayer ceux qui ne s’y sont jamais frottés… Véritable électron libre assoiffé d’expériences et de partage, cet amoureux fou de la musique s’amuse à ne jamais s’installer dans la routine en alternant des représentations et des projets aussi divers que variés ! Entre concerts en solo, prestations à deux pianos, démonstrations d’improvisation et ciné-concert, l’artiste prépare L’Alchimiste – un album qui sortira le 15 octobre prochain – dans lequel il a imaginé des duos entre les voix de Julien Doré, Pascal Obispo ou encore Véronique Sanson et ses réinterprétations au piano de leurs titres à eux…
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« L’improvisation a toujours été au coeur du classique ! »
Vous accordez régulièrement du temps – comme au Broc – au public amateur de musique…
Jean-François Zygel : Je fais très souvent des ateliers avec dejeunesélèvesoudesadultes car j’aime énormément ce genre de rencontres. On y parle de musique, d’improvisation, on démonte les pianos, on fait des essais, on échange… c’est très sympathique ! Et puis, même si ça requiert un peu de temps et d’organisation, ça me donne énormément d’énergie. Personnellement, ne rien faire, ça me fatigue ! (rires) Il ne faut pas voir le temps passé avec quelqu’un comme une dépense, mais au contraire comme un enrichissement !
Vous avez toujours eu en vous cette notion de transmission ?
Quand on est jeune, on est plus dans l’optique de comprendre et d’étudier que de transmettre. Avec le temps, on finit par prendre conscience que l’on est des passeurs. Et puis j’ai été élevé dans un idéal moins individualiste que celui que nous propose notre société actuelle. Lorsqu’on se centre trop sur soi, on fonde sa vie sur quelque chose de bien fragile…
L’improvisation fait plus penser au jazz qu’au classique…
L’improvisation a toujours été au cœur du classique ! Presque tous les grands compositeurs du XVIIIe et du XIXe siècle improvisaient, c’est d’ailleurs comme ça qu’ils se faisaient connaître du public. Mais à partir du XXe siècle, les pianistes ont petit à petit cessé d’improviser car on leur demandait d’apprendre et de jouer de plus en plus d’œuvres du passé. C’est pour lutter contre cette situation que j’ai fondé il y a 15 ans la classe d’improvisation au piano du Conservatoire de Paris.
Le classique continue à évoluer…
Le classique est plus vivant que jamais ! Il y a autant de compositeurs maintenant qu’il y en avait lors des siècles passés. Le problème vient des termes utilisés : on ne devrait pas parler de « musique classique » mais plutôt de « musique savante ». « Classique » laisse entendre que c’est figé, immuable, alors que c’est une musique en perpétuelle évolution…
L’improvisation est une liberté…
Avec les ateliers, je me suis aperçu d’un phénomène paradoxal. Les gens désirent tous la liberté mais, la plupart du temps, craignent de s’en saisir… La liberté, c’est le champ des possibles, c’est l’inconnu, alors c’est normal que ce soit trou-blanc ! Toutefois, la liberté de l’improvisation est limitée par l’esprit de « conséquence » car dès que nous posons un rythme ou une tonalité, il faut, par la suite, construire un enchaîne- ment logique. C’est un laisser-aller créatif, mais qui doit amener l’auditoire quelque part.
À quoi pense le cerveau pendant l’improvisation ?
Improviser, c’est un peu comme lorsque nous parlons. Lors d’une conversation, les idées s’enchaînent spontanément, mais en même temps, nous en contrôlons le déroulé et la logique.
Vous êtes connu pour vos capacités d’improvisateur mais vous êtes également compositeur…
La composition est le cœur de ma vie, mais c’est une activité qui requiert énormément de temps et qui est assez solitaire, alors qu’en improvisant, je peux voyager, dialoguer avec d’autres musiciens ou avec des acteurs, des danseurs… et même des sportifs ! (rires)
© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photo Droits réservés
Interview parue dans Le Mensuel de l’été 2017 n°383 éditions #1 et #2
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