INTERVIEW
Fabrice Éboué en interview
Bien qu’on ait pris l’habitude de le rencontrer régulièrement pour ses deux seuls en scène Faites entrer Fabrice Éboué ! et Fabrice Éboué levez-vous !, l’artiste est loin de n’être qu’un humoriste… Après les films Case départ et Le Crocodile du Botswanga dans lesquels il jouait, co-scénarisait et co-réalisait, c’est seul aux manettes que le comédien désormais habitué aux multiples casquettes s’est lancé dans son dernier projet cinématographique Coexister. Sur les routes de France pour présenter en personne au public son dernier né, c’est au Cinéma Le Lido de Saint Raphaël que nous avons pu nous seulement découvrir son travail en avant-première mais aussi en discuter avec lui. Animé depuis plus de 20 ans par sa passion pour la narration, Fabrice Éboué a cette fois-ci imaginé l’histoire d’un producteur de musique, qui, s’il ne veut pas tout perdre, a grandement intérêt à trouver une idée lumineuse pour faire des ventes ! Réunissant Guillaume de Tonquédec, Jonathan Cohen et Ramzy pour mettre sur pied un boys band religieux constitué d’un prêtre, d’un rabin et d’un imam, il fera certes un carton mais rappellera combien il est finalement naturel de vivre ensemble… En pleine adaptation du livre Petits suicides entre amis pour France 2, le comédien s’attaque actuellement à un autre type d’écriture, celui de la série.
En salles à partir du mercredi 11 octobre 2017
« Le message que véhicule le scénario nous a, à tous, tenu à coeur… »
Morgane Las Dit Peisson : Le boys band que tu as créé pour ton film Coexister chante plutôt pas mal…
Fabrice Éboué : (rires) Les trois chantent super bien en effet… En tous cas dans la version finale car on a eu recours à quelques petites astuces pour arriver à ce résultat là ! (rires) Jonathan Cohen est, c’est vrai, un très bon chanteur et c’est sa voix que les spectateurs découvriront dans le film par contre, en ce qui concerne Ramzy – tout comme Guillaume de Tonquédec -, il a été doublé par une voix assez similaire à la sienne au point d’ailleurs qu’il a fallu lui rappeler que ce n’était pas vraiment lui qui chantait… (rires) Mais les trois ont pris pas mal de cours de chant pour être vraiment crédibles à l’image, des cours de danse également donc ça a été un tournage très riche artistiquement…
Ce n’est donc pas pour la beauté de leur organe que tu as choisi ces trois acteurs…
En France, c’est encore assez difficile de réussir à trouver des artistes multiples alors j’ai surtout privilégié la comédie et les personnages. J’ai d’ailleurs écrit, dans un premier temps, en pensant à Ramzy car je trouve que le côté ahuri et décalé est réellement fantastique et naturel quand il est joué par lui… Ensuite, le choix de Guillaume de Tonquédec pour incarner le prêtre s’est un peu imposé car il semble l’être au quotidien, sans nul besoin de soutane ! (rires) Et en ce qui concerne Jonathan Cohen, je connaissais ses vidéos de Serge le Mytho mais je ne l’ai sélectionné qu’après son casting… J’avais imaginé un rabin plus âgé mais en découvrant ses essais, j’ai compris que le rôle était fait pour lui.
Une fois encore, dans Coexister, tu arbores les trois casquettes d’acteur, réalisateur et scénariste…
Quand on touche à tous ces postes il faut en effet avoir beaucoup de recul… Pour le scénario, j’ai été très bien
entouré par des gens réellement compétents de chez EuropaCorp qui a produit le film. Je leur ai demandé d’être francs – ce qui est de plus en plus rare dans ce métier – et ils l’ont été ! (rires) J’ai besoin que l’on me dise les choses telles qu’elles sont pour pouvoir avancer sereinement… Et pour le jeu pendant le tournage, j’ai toujours à mes côtés un assistant technique en qui j’ai entièrement confiance et qui m’aide à avoir un regard un peu plus extérieur.
Trois personnages religieux sont en tête d’affiche mais la religion n’est pas au coeur du film…
En effet, la religion n’est qu’un prétexte à mettre en scène trois bras cassés réunis pour chanter ensemble en ajoutant autant de drôlerie que de complications… C’est le plus vieux scénario du monde en réalité ! On met côte à côte des personnalités qui ne se ressemblent pas mais qui vont tout de même devoir s’entendre en visant un but commun prouvant ainsi qu’il est tout à fait possible de Coexister… Sur le tournage, c’est un peu ce qu’il s’est passé bien que l’ambiance qui régnait ait été géniale malgré nos différences… Chacun d’entre nous s’est comme senti investi d’une mission car, pour des raisons personnelles ou culturelles, le message que véhicule le scénario nous a, à tous, tenu à coeur.
Cinq ans séparent Le Crocodile du Botswanga et Coexister…
J’ai été très vigilant sur le scenario de ce nouveau film car même si j’ai aimé le précédent, je me suis aperçu qu’il aurait pu être un peu plus bossé. J’ai donc choisi de prendre mon temps pour étudier la trajectoire des personnages car je désirais vraiment qu’ils aient des choses à régler dans leurs vies, que l’histoire se présente à eux comme un voyage initiatique et que le fait de devoir travailler ensemble leur apporte mutuellement.
Et ça parle aussi de la société d’aujourd’hui…
Oui, j’avais aussi envie d’aborder notre système de divertissement à travers l’exemple de cette grosse multinationale qui rachète tout et qui impose un rendement aux domaines artistiques. J’ai d’ailleurs voulu que Coexister soit vraiment à l’inverse de ce qu’il dépeint, c’est-à-dire qu’il sorte des tripes, qu’il soit fait avec l’âme, en somme, qu’il soit un projet d’artiste et pas un projet marketing comme on en voit de plus en plus en cinéma et en musique…
Un film pas moralisateur mais bienveillant…
C’est vrai que je n’aime pas tellement prôner des messages mais s’il y en a un que j’assume pleinement, c’est celui de rappeler qu’au delà de toutes notions religieuses ou politiques, on ne reste que des êtres humains qui vivent des histoires d’amour, de ruptures et d’amitié finalement assez similaires… J’ai essayé d’être le plus juste et impartial possible et surtout de ne pas faire d’humour « gratuit » et bêtement méchant. À partir du moment où les vannes et les gags essaient d’étayer un propos et de suivre la trajectoire des personnages, ça implique d’être bienveillant et constructif…
Propos recueillis par Delphine Goby O’Brien • Photos EuropaCorp
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